La guerre de désintégration de l’Etat national libyen a-t-elle créé
une situation de violence chaotique qui agit désormais comme un trou
noir qui va engloutir le voisinage ? Etait-il clair pour l’observateur
moyennement cultivé que Kadhafi tenait en mains un Etat constitué sur un
territoire et une société profondément divisés en confréries
religieuses et confédérations tribales centrifuges ? Etait-il prévisible
que la démolition de cet Etat renverrait le pays aux luttes ethniques,
raciales, confessionnelles ?
Les USA ont-ils joué un rôle clé dans cette destruction par leurs
conseils dans la réorientation des politiques libyennes et pour la
désignation d’hommes-clés à la justice et à l’économie des futurs chefs
du Conseil National de Transition, Jibril et Abdeljalil, qui siégeront
aux côtés de Belhadj, chef d’El Qaïda en Libye et, néanmoins, invité de
marque des gouvernements français ?
Pour les chefs de cet Occident réputé rationaliste, terre des
sciences sociales et politiques, la démocratie présentée, pour ce
qu’elle n’a jamais été, un libre choix individuel tel ou tel parti
politique, sans interférence familiale, clanique, tribale ou
confessionnelle avait-elle la moindre chance de naître dans une société
libyenne précisément patriarcale, clanique, tribale, ethniquement
divisée ?
Ces chefs de l’Occident pouvaient-ils ignorer, que la démocratie
formelle, du bulletin choisi dans l’isoloir, avait précisément donné en
Irak, le vote ethnique et confessionnel qui a mené au pouvoir des élus
plus attachés à entre leurs communautés qu’à l’unité et à l’identité
irakiennes ?
Les Obama, Hillary Clinton, Cameron, Sarkozy ou les messianiques
socialistes français pouvaient-ils ignorer que des actes politiques
aussi graves que la destruction des Etats, au prétexte de combattre des
régimes, a forcément des conséquences, malgré les avertissements
des gouvernants algériens, nigériens, maliens, sud-africains, et de
l’Union Africaine qui les avait abondamment prévenus du chaos qui en
découlerait et de l’extension de la violence et de l’instabilité dans
toute la région nord du continent et, au-delà, du Sahel ?
Les dirigeants occidentaux sont, bien au contraire, très intelligents, très bien informés et soutenus par des think tanks ;
des structures universitaires rodées dans les recherches
anthropologiques sur les peuples des terres colonisables ; des services
secrets performants pour l’infiltration, l’influence ou la collecte des
données et facteurs sociologiques et démographiques, comme le prouvent
les rapports prospectivistes de la CIA.
Ces opérations de dissolution des Etats nationaux avaient pour but
précisément de détruire les structures modernes que sont les Etats
nationaux, pour ouvrir des autoroutes aux identités communautaires
primitives de la confession et de la tribu, pas même des identités
proto-nationales des Etas féodaux.
C’était le but de la présidence Obama qui devait parachever celui de
Bush. Nous avions compris que le discours, sur l’Islam, inaugural de la
présidence Obama au Caire, du 4 juin 2009, avait pour but de corriger
l’image désastreuse des USA dans nos pays. Nous n’avions pas compris
qu’il annonçait la décision US de parachever la mise à mort des Etats
nationaux arabes, commencée sur le champ de bataille irakien, et de
mettre au pouvoir les Frères Musulmans ou leurs parentèles wahhabites ou
salafistes, dans les pays qui en furent les phares.
L’attentat de Sousse est une étape dans cette marche contre les pays
résilients comme la Tunisie, l’Egypte, la Syrie, l’Algérie, le Yémen qui
ont réussi à renverser la vapeur, et à mettre ce plan américain en
échec. Celui du Bardo du 18 mars 2015 a fait accepter au président
tunisien la présence d’une base américaine et l’association de son pays à
l’OTAN qu’il refusait encore au mois de février 2015.
Cet attentat mènera notre région plus loin dans une «configuration yéménite»
de bases américaines agrégées à un simulacre de lutte sans fin contre
le terrorisme et qui permettra aux USA de nous saigner à blanc et de
nous imposer leurs décisions, relayées et soutenues à l’intérieur par
les oligarques et le lobby néocolonial.
impact24.info
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