On se doute bien que les émissaires de l’Arabie saoudite ne restèrent pas les bras ballants devant l’affront. Abdallah al-Mouallimi, représentant permanent du régime saoudien auprès de l’ONU, exigea que le rapport incriminant son pays soit « rectifié immédiatement » et que l’Arabie saoudite soit retiré de la liste infamante de manière « irréversible et sans condition ».
On vient même d’apprendre que l’Arabie saoudite — qui préside actuellement une commission de l’ONU chargée des Droits de l’homme ! — était même allée jusqu’à menacer de quitter l’ONU et de la priver de centaines de millions de dollars d’aide pour son programme humanitaire.
Mais de là à voir Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations unies, s’exécuter aussi promptement interroge quant aux autres pressions qu’il dût subir de la part de quelques alliés de la monarchie saoudienne, beaucoup plus regardants sur leurs intérêts géostratégiques que sur le droit à vivre de quelques enfants yéménites. Rappelons que les États-Unis et le Royaume-Uni participent de très près aux expéditions militaires de la coalition au Yémen.
Les ONG humanitaires comme Human Rights Watch (HRW) crient à la « capitulation ». D’autant que le dossier établi par l’ONU contre les crimes saoudiens au Yémen était fort étayé et ne laissait nul place au doute :
« Le rapport du Secrétariat général de l’ONU, lui-même, établissait qu’en 2015 plus de 785 enfants avaient été tués au Yémen, plus de 1000 avaient été blessés et que 60% de ces pertes-là étaient directement imputables à la coalition dirigée par l’Arabie Saoudite » (HRW).
La volte-face de l’ONU ne doit cependant pas surprendre. Elle s’inscrit dans le cadre du délitement des institutions mise en place aux lendemains de la Seconde guerre mondiale. Comme la déliquescence des dirigeants politiques occidentaux, elle illustre l’agonie d’un système qui n’est même plus fichu de sauver un minimum d’apparences et de crédibilité.

Mais que cette volte-face honteuse ne soit pas surprenante ne la rend pas plus supportable pour autant.

Le Yéti