Le Président avait
promis un statut officiel pour son épouse. Un dispositif critiqué
par des députés et 220 000 pétitionnaires. L’Elysée pourrait donc se
rabattre sur une simple charte.
Elle aura «un rôle, un vrai statut et une capacité à faire, s’était enflammé le candidat Macron à propos de sa femme, Brigitte. Elle ne sera pas cachée, parce qu’elle partage ma vie, parce que son avis m’est important.»
Le président Macron pourrait finalement renoncer à créer un statut
juridique à la «première dame» et se borner à encadrer son action via
une simple «charte de la transparence», a affirmé lundi soir
BFM TV. Cela permettrait au chef de l’Etat de montrer aux Français - et à
son épouse - qu’il a tenu sa promesse, de se démarquer des errements de
l’ère Hollande. Et en même temps de couper court à la polémique. Car la
pression sur l’Elysée n’a cessé de monter sur ce dossier ces derniers
jours. En trois semaines près de 220 000 personnes ont signé la pétition
s’opposant à la création d’un statut officiel, mise en ligne sur
Change.org par Thierry Paul Valette, un homme qui se présente comme un «artiste peintre et auteur engagé» (à gauche).
Pourquoi cette pétition ?
«Dans une période de moralisation de la vie politique française,
au moment du vote d’un décret interdisant aux députés d’employer un
membre de leur famille […], nous ne pouvons donc décemment cautionner
l’initiative d’un statut spécifique à l’épouse du président Macron», explique
Thierry Paul Valette sur la plateforme. On notera qu’en mai 2016, 69 %
des Français y étaient opposés, d’après un sondage Ifop publié par le
magazine Point de vue. À l’Assemblée nationale, les députés
n’ont pas raté le coche : lors des débats sur la loi de moralisation de
la vie politique, le sujet s’est invité. Le député de La France
insoumise Ugo Bernalicis a même défendu un amendement pour qu’aucun
moyen ne puisse être alloué au conjoint du président dans le budget de
l’Etat. «Brigitte Macron serait donc une collaboratrice. Pourtant, on va interdire aux députés d’employer leur famille, non ?» a pour sa part twitté son collègue insoumis Eric Coquerel.
Pour comprendre l’origine de la polémique, il faut revenir à avril.
Sur le plateau de TF1, le candidat Emmanuel Macron affirme vouloir «clarifier» le statut du conjoint du chef de l’Etat, qui n’apparaît dans aucun texte officiel. Le leader du mouvement En marche veut «sortir d’une hypocrisie française». «Je souhaite qu’un cadre soit défini et je demanderai qu’un travail soit conduit en la matière.», déclare-t-il alors. Précisant juste qu’elle ne serait «pas rémunérée par la République».
Quid du statut faute d’un texte ?
«Puisque rien n’est écrit, tout reste à inventer. Mais je
continuerai à travailler d’une façon ou d’une autre si François est élu», expliquait en 2012 à Libération la future ex-first girlfriend
Valérie Trierweiler. Le rôle des conjointes des présidents a évolué en
fonction de leur personnalité et des époques. Claude Pompidou, Danielle
Mitterrand et Bernadette Chirac se sont beaucoup investies dans des
fondations. Anne-Aymone Giscard d’Estaing et Carla Bruni-Sarkozy ont été
plus discrètes.
Qu’elles disposent d’un budget propre - comme l’envisageait Emmanuel
Macron - ou non, les premières dames représentent déjà un coût pour les
finances publiques. Si la fonction de «première dame» n’apparaît dans
aucun texte officiel, des moyens lui sont alloués. Brigitte Macron,
comme ses prédécesseures, bénéficie d’un bureau, d’un cabinet ainsi que
d’un service de protection. Un dispositif financé par l’Etat que la Cour
des comptes évaluait en 2014 à 450 000 euros par an. La première dame
doit également se plier à quelques obligations : un conseiller disposant
d’une délégation de signature du président doit par exemple
systématiquement l’accompagner pour régler ses achats. En 2013, Valérie
Trierweiler disposait de cinq collaborateurs à l’Elysée. Total de leurs
salaires nets mensuels : 19 742 euros. Loin des quelque 37 000 euros
dépensés pour le staff de Carla Bruni-Sarkozy à la fin du quinquennat de
son mari.
Depuis, le budget global de l’Elysée a été réduit. Sur les dents
après sa rupture compliquée avec Valérie Trierweiler, François Hollande a
officiellement achevé son quinquennat en célibataire, Julie Gayet
n’apparaissant à l’Elysée que sur des photos volées, ne coûtant
quasiment rien au contribuable (hormis pour sa sécurité). Le train de
vie de la première dame a donc été revu à la baisse. Finie l’époque où
deux chauffeurs étaient à la disposition de Bernadette Chirac. Brigitte
Macron n’en aura qu’un. La création d’un statut - ou d’une charte -
reviendrait à valider juridiquement ou à simplement graver dans le
marbre des pratiques existantes.
Et dans les autres pays ?
Aux Etats-Unis, le rôle de première dame est institutionnalisé.
En 1978 sous Jimmy Carter, une loi lui a attribué un staff de
12 personnes. La «Flotus» (First Lady of the United States) dispose de
deux canaux de communication officiels : un site et un compte twitter. À
l’inverse, en Allemagne. Joachim Sauer, le mari d’Angela Merkel, n’a
aucun statut officiel. «Quand les invités viennent tous avec leurs
conjoints, j’apprécie qu’il soit lui aussi à mes côtés. Mais je ne lui
impose rien. Je ne fais que suggérer…» confiait la chancelière à Gala
en 2009. Au Royaume-Uni, Philip May est un inconnu. Le rôle de
représentation donné aux conjoints est réservé à la famille royale.
liberation.fr
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