Antoine Manessis
La droite, avons-nous déjà dit sur ce blog, existe...
...et si, contrairement à Libé qui voit Xavier Bertrand "triomphalement élu" dans le Nord, nous pensons que son élection avec 70% d'abstention doit être relativisée. Mais le danger de nous retrouver avec un président de droite en 2022 ne doit pas être nié.
La tenaille Macron/RN reste toujours un problème pour la droite mais la normalisation de Marine Le Pen, la dédiabolisation du RN, finit par redonner un espace à une droite que peu de chose sépare du RN et qui du coup peut neutraliser l'aspect protestataire, "anti-système" du RN et donc aussi l'électorat populaire et jeune du néo-fascisme. La droitisation de Macron produit le même résultat.
L'électorat de droite peut donc être tenté par les trois mouvances : macronisme, lepénisme et droite. On se souvient que Fillon fut le 3e homme des présidentielles de 2017 avec 20%. Or 20% Le Pen, 20% Macron, 20% pour le candidat de droite, sont envisageables aujourd'hui encore et donc les jeux restent très ouverts.
Le choix du candidat comptera ainsi que, évidemment, sa ligne politique. On voit déjà les nuances dans les discours de Xavier Bertrand, Valérie Pécresse et Laurent Wauquiez. Ils ne font pas le même calcul : pour les uns il s'agit de rassembler au 1er tour son camp, la droite et la droite extrême afin d'affaiblir le RN, pour les autres de rassembler le plus largement possible en mordant sur l'électorat macroniste et centriste voire social-libéral (ce que Pécresse a fait avec Valls et Huchon).
Nous avons expliqué par ailleurs ( le14 juin dans Adieu la droite) pourquoi la droite ne peut porter une ligne "sociale". Reste que des différences tactiques subsistent souvent déterminées par le choix de l'adversaire premier : Macron ou Le Pen. Déterminées aussi par les catégories sociales ciblées en priorité outre le socle traditionnel de la droite.
Reste que l'équilibre et même l'équilibrisme entre le discours d'ordre, réactionnaire, antisyndical, patronal et l'adresse aux couches populaires harassées par la politique de Macron - Xavier Bertrand est allé jusqu'à s'adresser aux "invisibles", aux Gilets jaunes... - reste une difficulté majeure pour ce camp. La démagogie se heurtera à des questions concrètes : quid de la réforme des retraites ? Quid de celle de l'assurance chômage ? Quid des services publics ? Quid de l'indépendance dans l'UE ?
Quant à l'extrême-droite, elle se trouve également dans une situation compliquée : sa normalisation (sur l'UE, l'euro, les questions sociales et sociétales) la normalise aux yeux de son électorat populaire et lui ôte sa spécificité et donc son attrait. La question de ses alliances est aussi complexe. Marion Maréchal Le Pen et Marine Le Pen n'ont de toute évidence pas la même vision. On a vu en Italie que l'alignement de Salvini au gouvernement d'union nationale de Draghi a mécaniquement provoqué la montée du parti néo-mussolinien Fratelli d'Italia resté hors du gouvernement et du coup seule opposition visible. La gauche étant pulvérisée et inexistante au parlement. Cela n'excluant nullement la menace Le Pen en 2022.
Quant à "l'opération Zemmour", si elle se concrétise, on y verra une manœuvre visant à affaiblir Marine Le Pen et la droite et donc à favoriser Macron. Le milliardaire Vincent Bolloré, comme par hasard patron de Zemmour et propriétaire de C-News, Europe1, Paris-Match ou Le Journal du Dimanche (JDD), des médias stratégiques pour la campagne de 2022, étant au gouvernail de cette affaire.
Notons enfin, et cela est central, que l'homme à abattre pour toutes les droites, du PS aux LR en passant par le RN, c'est Jean-Luc Mélenchon. Il est la cible de toutes les attaques jusqu'aux plus viles. Cela devrait finalement permettre aux progressistes de faire le bon choix.
Tout cela étant dit, chacun devrait savoir que la droite, la macronie et le RN, ce sont fondamentalement bonnets blancs et blancs bonnets.
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