mercredi 11 septembre 2024

Assurance-chômage, sécurité sociale, austérité : les chantiers anti-ouvriers de Barnier

Roxane Sinigaglia

À peine arrivé à Matignon, Barnier se lance dans un contre-la-montre pour préparer un budget austéritaire et reprendre les attaques anti-ouvrières. 

De l’assurance-chômage à la défense de la réforme des retraites, en passant par la sécurité sociale, le gouvernement compte bien faire payer le prix fort aux travailleurs au nom du « déficit ».

Michel Barnier a moins d’un mois pour finaliser le projet de loi de finances 2025 et le soumettre au Parlement, dans un contexte de crise importante des finances publiques. Alors que les prévisions annoncent un déficit de 5,6% du PIB en 2024, pouvant aller jusqu’à 6,4% en 2026, le gouvernement, sous surveillance de la Commission européenne et des marchés financiers, doit trouver des solutions pour ralentir cette dynamique, sans pour autant toucher aux caisses du patronat. Au programme donc, le nouveau locataire de Matignon s’attelle aux dossiers anti-ouvriers et austéritaires les plus urgents.

Défendre la réforme des retraites

Pour commencer, le 1er ministre compte bien défendre la réforme des retraites de 2023, une des lignes rouges fixées par Macron pour choisir le chef du futur gouvernement. Alors que le RN a annoncé déposer le 31 octobre à l’Assemblée Nationale une proposition de loi pour revenir à la retraite à 62 ans, qui devrait être soutenue par le NFP, les débats s’annoncent houleux.

Michel Barnier, fervent défenseur de la retraite à 65 ans en 2021, semble clair sur ce point : il n’y aura pas de modification en profondeur de la réforme. Vendredi dernier, sur TF1, il a seulement annoncé vouloir « ouvrir le débat sur l’amélioration de cette loi pour les personnes les plus fragiles ». Une façon d’offrir quelques miettes pour justifier de ne rien toucher au projet de loi anti-ouvrier.

Pour résorber le déficit, tous les moyens anti-ouvriers sont bons

Michel Barnier doit rendre pour le 1er octobre le projet de loi de finances 2025 auprès du Parlement, et ce, dans un contexte de crise politique qui promet des blocages à l’Assemblée, ainsi que de crise budgétaire qui le met sous pression des institutions financières européennes. Des pistes avaient déjà été présentées par le cabinet de Gabriel Attal et les experts de Bercy. Parmi elles, la mise en place de plafonds de dépense pour les ministères, ou encore la suppression de 1600 classes et de 1400 à 1800 postes d’enseignants. Autant de mesures austéritaires permettant de faire payer la crise aux travailleurs.

Michel Barnier entend s’attaquer à un autre chantier pour résorber le déficit public : la Sécurité sociale. Alors qu’elle était dans le viseur du gouvernement depuis plusieurs mois, des coupes austéritaires dans la Sécu pourraient bien finir par voir le jour sous le gouvernement Barnier. Dans un interview aux Échos, Thomas Fatôme, le directeur général de la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM), annonce déjà mettre en place plusieurs mesures pour « maîtriser le coût des arrêts de travail ». Les personnes ayant un arrêt-maladie de plus de dix-huit mois seront contrôlées pour « voir si leur arrêt est justifié », et les médecins « qui prescrivent des arrêts de manière importante » feront également l’objet d’une vérification de leur activité.

La prise en charge des soins pour les personnes souffrant de maladies chroniques semble également menacée, comme c’était déjà le cas sous le gouvernement Attal. Le Conseil des prélèvements obligatoires préconise aussi de revoir la direction que prennent les impôts et taxes prélevés par Bercy. Selon lui, certains bénéficiaires comme la Sécurité sociale ou les collectivités locales reçoivent trop, au détriment du budget global. L’Élysée cherche finalement à faire des économies sur le dos des malades et des personnes les plus précaires.

La réforme de l’assurance-chômage : un chantier anti-pauvres à reprendre

Un autre chantier devrait également être étudié par le cabinet de Michel Barnier, celui de la réforme de l’assurance-chômage, qui avait été mise sur pause par Gabriel Attal dans l’entre-deux tours des législatives et reportée au 31 octobre. Pour rappel, celle-ci prévoit de durcir drastiquement les conditions permettant aux demandeurs d’emploi de toucher l’assurance-chômage : la durée de travail nécessaire pour en bénéficier passerait de six à huit mois, sur une période de référence qui est réduite à vingt mois au lieu de vingt-quatre, et la période d’indemnisation passerait de dix-huit à quinze mois. Sous prétexte de « réhabiliter le travail », encore une fois, c’est sur le dos des travailleurs les plus précaires que le gouvernement entend faire des économies, espérant récupérer 3,6 milliards d’euros par an.

Avec tous ces chantiers anti-ouvriers, Michel Barnier entend proposer un budget 2025 d’austérité et répondre aux attentes des classes dominantes et des institutions européennes. Une politique qui pourrait se heurter à la réalité d’une crise politique loin d’être résolue. Le vote du budget à l’Assemblée s’annonce notamment être une épreuve difficile pour le gouvernement, qui pourrait faire face à une motion de censure et voir s’accentuer la crise de gouvernabilité qu’il traverse.

Une situation de fragilité du gouvernement dont les travailleurs doivent profiter pour construire un mouvement de masse, qui permette de faire reculer Macron...

...mais aussi de conquérir des revendications urgentes sur les terrains économiques et démocratiques, pour affronter le patronat et le régime.

Révolution Permanente

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