L’avenir de la Palestine est lié au droit européen, le seul à prendre
sérieusement en compte le droit international. Ne pas l’admettre est une erreur
décisive, et les dirigeants palestiniens et israéliens, totalement focalisés sur
les US, sont bien à côté de la plaque.
Hier, l’Union européenne a interdit l’importation des volailles issues des colonies israéliennes en Cisjordanie.
On s’en fout, répond l’occupant, car c’est même pas 5%… Sauf que le problème
n’est pas les 5% de poulets, mais la règle qui permet cette interdiction, qui
est générale… et qu’Israël n’a pas contestée devant la Cour de Justice de
l’Union Européenne (CJUE) ! La roue tourne…
L’Europe : des Etats qui se soumettent au droit
Qu’il est de bon ton de vomir sur l’Union européenne… la source de tous les
maux, le terrain de jeu du capitalisme mondialisé et autres délires de bac à sable, où Montebourpif et Besancenot se disputent le râteau
et la pelle.
J’irai voter dimanche, et deux fois plutôt qu’une, avec une admiration
profonde pour cet espace de droit et de fraternité qu’est l’Europe. L’Europe, ce
sont de grands Etats qui acceptent de se soumettre au droit, et – cerise sur le
gâteau – la Cour de Justice de l’Union européenne (Kadi, 2008) est la
seule juridiction à avoir condamné le Conseil d’(in)Sécurité. Le fait que Papy
Sarko sorte de son trou pour demander la remise en cause de Schengen montre bien
tout ce qu’apporte l’Europe, contre les égoïsmes nationaux, mortifères.
Les poulets des colonies sont illicites
Hier, l’Union Européenne a notifié au ministère de l’Agriculture israélien
qu’elle ne reconnaissait son contrôle vétérinaire que dans les frontières de
l’Etat d’Israël d’avant 1967 et que la volaille élevée dans les colonies n’était
donc pas conforme aux normes requises pour l’importation. De telle sorte, est
interdite l’importation de volailles et d’œufs des colonies israéliennes en
Cisjordanie.
Interrogé par l’AFP, le ministère s’est refusé à tout commentaire, mais le
site d’information Walla a assuré la permanance :
« Il faut noter que la production de volaille et des
produits dérivés dans les colonies représente moins de 5% de la production
israélienne, l’impact de la nouvelle ligne directrice européenne ne sera donc
pas important du point de vue économique ».
Les mecs sont nuls
5% c’est rien, c’est sûr,… sauf pour les 5% touchés, qui vont être coulés et
qui vont se faire entendre… Mais le vrai problème, évidemment, ce n’est pas ces
5%, mais la règle qui fonde cette décision, et là, ça devient sérieux. On entre
dans le dur car la décision rendue pour les poulets n’est que la première d’une
longue série, venant en application d’une règle de base… qui n’a pas été
contestée en justice ! Les importations illégales vont tomber comme les feuilles
en automne.
Quelle est cette base ?
Il s’agit d’un acte de la Commission européenne, dénommé « Lignes directrices
relatives à l’éligibilité des entités israéliennes établies dans les territoires
occupés par Israël depuis juin 1967 et des activités qu’elles y déploient aux
subventions, prix et instruments financiers financés par l’UE à partir de
2014 », n° 2013/C 205/05, publié au Journal officiel de l’Union
européenne du 19 juillet 2013, page 9.
Quelles sont les fondements de ce document ?
On ne peut être plus clair.
« L’UE ne reconnaît pas la souveraineté d’Israël sur les territoires occupés
par Israël depuis juin 1967 » que sont le plateau du Golan, la bande de Gaza et
la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est et « ne les considère pas comme faisant
partie intégrante du territoire d’Israël, indépendamment du statut légal qui
leur est conféré par le droit national israélien » (CJUE, 25 février 2010,
C-386/08, Brita, Rec. 2010, p. I-1289, points 47 et 53).
L’UE a fait savoir qu’elle ne reconnaîtrait aucune autre modification du
tracé des frontières d’avant 1967 que celles approuvées par les parties au
processus de paix au Proche-Orient (PPPO). Elle agit par référence au
Conseil des Affaires étrangères de l’UE qui a souligné l’importance de limiter
l’application des accords avec Israël au territoire israélien reconnu par
l’Union. Selon les conclusions du Conseil Affaires étrangères sur le PPPO,
adoptées le 10 décembre 2012, « tous les accords entre l’État d’Israël et
l’Union européenne indiquent clairement et expressément qu’ils ne s’appliquent
pas aux territoires occupés par Israël en 1967 ».
Quelles modalités ?
Le texte est très précis :
« 9. En ce qui concerne le lieu d’établissement des entités israéliennes:
« a) dans le cas de subventions et de prix, seules les entités israéliennes
dont le lieu d’établissement est situé à l’intérieur des frontières d’Israël
d’avant 1967 seront considérées comme éligibles;
« b) dans le cas d’instruments financiers, seules les entités israéliennes
dont le lieu d’établissement est situé à l’intérieur des frontières d’Israël
d’avant 1967 seront considérées comme éligibles en leur qualité de bénéficiaires
finals.
« 10. Par lieu d’établissement, on entend l’adresse légale d’enregistrement
de l’entité, confirmée par une adresse postale précise correspondant à un
emplacement physique concret.
L’Union européenne est signataire des accords d’Oslo qui précise que les
frontières font l’objet de négociation entre les parties, à l’article 31 :
« Neither side shall take any steps to change the status of Gaza and the West
Bank pending the outcome of the permanent status negotiations ». Oui, et l’Union
européenne répond : « Quand un accord international régulier entérinera de
nouvelles frontières, nous l’appliquerons. Mais en attendant, le droit
international, c’est la frontière d’avant 1967 ».
Israël n’a pas contesté en justice les règles nouvelles
Bon, résumons : l’Union européenne adopte des mesures réglementaires qui font
grief à Israël, et Israël en fait des tonnes pour dire qu’il n’acceptera pas ces
règles. Pour Israël, ces règles étaient une aberration. Pas de problème : il
suffisait de faire un recours devant la juridiction européenne dans les deux
mois. Franchement, ça n’aurait pas dû faire un pli : la « seule démocratie » du
Proche-Orient allait user d’un recours démocratique devant une juridiction
démocratique pour faire valoir ses arguments démocratiques. Eh ben non, Israël a
fulminé contre ces nouvelles règles, mais ne les pas attaqués en justice et ces
règles sont devenues définitives. Cela aurait pourtant été intéressant alors que
la CEDH a jugé que l’occupation militaire, quand elle devient un procédé de
conquête de territoire, était illégale et engageait la responsabilité de l’Etat
occupant à indemniser des dommages causés (CEDH [GC], Chypre c. Turquie, 12
mai 2014, no 25781/94).
L’ANP ( Autorité Palestinienne ) totalement hors-jeu…
Une fois de plus, la calamiteuse ANP est totalement hors-jeu, ne voulant
surtout pas prendre le risque de froisser son maître, les Etats-Unis
(Territoire indien occupé, Amérique du Nord). Pas un mot sur cette
immense victoire, pas un seul commentaire…
Quant à sa tristounette filiale française, l’AFPS (Association France
Palestine Solidarité), elle continue, avec une constance remarquable, à
perdre ses procès en les fondant sur des arguments hors d’âge, faisant sombrer
la cause à l’aune de son incompétence crasse.
Alors, la Commission européenne plus efficace que l’ANP et ses filiales
dépressives pour défendre les droits des Palestiniens ? Je ne fais là qu’un
constat, mais il est évident, et pose de sérieuses questions.
Depuis 70 ans, la Palestine se plaint de la violation de ses droits ? Combien
de fois a-t-elle engagé de sérieuses actions en justice ? Jamais. Un problème
sérieux, très sérieux…
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