dimanche 3 mai 2015

L’agriculture industrielle : principale responsable du réchauffement climatique

Two-day-old triplet lambs, Bucklebury, Berkshire, Britain - 27 Mar 2015
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L’agriculture est à la fois victime et responsable du changement climatique. Mais les principales victimes ne sont pas les coupables et inversement… Du côté des victimes, parler d’agriculture, c’est parler du travail et des moyens de subsistance des paysans et paysannes ; c’est parler de sécurité et de souveraineté alimentaire pour l’immense majorité de la population. Du côté des coupables, c’est parler agro-industrie, firmes semencières, industrie chimique ; c’est parler profit, concurrence et spéculation (dernière en date, le beurre), TAFTA et grands projets inutiles ; c’est aussi parler des politiques des gouvernements obsédés par la libéralisation et la levée de toute limite aux droits de polluer (comme le récent recul sur la directive nitrates), d’épuiser la terre et de breveter le vivant, de supprimer toute régulation, avec par exemple les quotas laitiers, et laisser une totale liberté au marché…
 
Par sa capacité de stockage du carbone, la capacité de l’agriculture de lutter contre le réchauffement climatique n’a pas échappé aux capitalistes qui voudraient bien pouvoir mettre un prix à ces puits de carbone, pour pouvoir en profiter comme ils l’ont fait avec le marché du carbone… Il faut les combattre, eux et leur « agriculture intelligente face au climat ». Leur but est de sauvegarder une industrie mortifère tout en s’accaparant des fonds destinés à lutter contre le réchauffement climatique. Quitte à éliminer au passage les paysans !
L’agriculture industrielle et l’élevage concentrationnaire sont responsables de quasiment la moitié des gaz à effet de serre (GES). Ces deux pans de l’agro-industrie ne peuvent pas être dissociés car la plus grande partie des grandes cultures est destinée à l’alimentation animale. L’agriculture industrielle repose sur l’utilisation d’intrants issus de la chimie, dont la fabrication nécessite de grandes quantités d’énergie. L’azote est le premier composant de l’atmosphère terrestre (4/5). Les plantes n’y ont pas accès directement à part les légumineuses qui utilisent des bactéries, les rhizobiums, avec qui elles vivent en symbiose. Quand ces plantes meurent, l’azote qu’elles ont stocké est mis à la disposition des autres plantes. Pour le phosphore, ce sont des symbioses mycorhiziques qui permettent aux plantes d’y accéder. Les engrais chimiques fournissent aux plantes ce qu’elles savent pourtant se procurer naturellement. Cela pour le plus grand profit des pétroliers et des chimistes…
L’utilisation d’engrais azotés et leur dénitrification dans les champs donne lieu à des émanations de protoxyde d’azote N2O, un gaz à effet de serre 290 fois plus puissant que le dioxyde de carbone… et le premier contributeur agricole aux GES en France. Les cultures industrielles accaparent toujours plus de terres arables. Dans les pays du sud, elles sont la cause principale de déforestation, que ce soit pour les palmiers à huile comme en Malaisie ou en Indonésie, ou pour la culture de soja au Brésil. Ces cultures sont destinées à l’alimentation animale, aux agro-carburants et à l’industrie agro-alimentaire. La spécialisation des cultures en grandes zones géographiques est source de transports à l’échelle mondiale (soja en Amérique du Sud, maïs aux États-Unis, etc.). Mais l’industrialisation touche aussi les fruits et légumes qui, pour être disponibles toute l’année, sont produits soit dans l’autre hémisphère, soit sous serres chauffées. Le marketing et l’effet de mode jouent aussi un rôle non négligeable sur l’approvisionnement en produits exotiques censés être indispensables à notre santé 
L’élevage industriel est intimement lié à ce type d’agriculture. Pour maximiser les profits, la croissance des animaux doit être accélérée au maximum : ainsi, un poulet bio à l’« ancienne » est abattu à 120 jours, un poulet fermier à 80 et un poulet industriel à 37 ! Un porc noir gascon élevé en plein air vivra au moins deux fois plus longtemps qu’un porc rose en stabulation. Pour arriver à cet exploit, les élevages industriels gavent leurs animaux aux antibiotiques et leur donnent une alimentation extrêmement riche. Interdits de pâturage, les ruminants sont ainsi transformés en granivores : au menu, maïs et soja OGM, y compris en France, où la culture et la vente pour la consommation humaine de soja OGM sont interdites… mais où son usage pour l’alimentation des animaux que nous consommons est autorisé (à l’exception de la viande bio). L’enfermement des animaux est aussi source de dépense énergétique : chauffage, ventilation, éclairage. L’agro-industrie pousse à la consommation de viande de mauvaise qualité à des niveaux nuisibles pour notre santé. Il est clair qu’un régime moins carné permettrait de réduire nos émissions de carbone. Mais contrairement à ce qui est souvent dit, le problème ne vient pas des pets ou des rots du bétail mais bien du type d’élevage. Des vaches qui paissent sur une prairie naturelle ne rejettent que le carbone constitutif du fourrage et que les plantes ont pris dans l’air grâce à la photosynthèse, le bilan est donc neutre. Ce sont bien les cultures fourragères industrielles qui sont émettrices de GES.
Pour rester dans la course au profit, la stratégie du capitalisme du 21e siècle implique des véhicules constamment en mouvement, dont les cargaisons peuvent être achetées et vendues plusieurs fois au cours d’un trajet C’est le règne du tout-camion avec les méthodes « modernes » de gestion « zéro stock », « flux tendu » ou « juste à temps », qui conduisent à multiplier les transports afin de suivre au plus près l’utilisation des marchandises. Les économies de gestion des stocks découlent ainsi de la circulation d’un flux ininterrompu de véritables « stocks roulants ». Or, avec la même consommation d’énergie, la tonne de fret parcourt 5 fois plus de distance par cabotage maritime, 4 fois plus par train entier, 2 fois plus par voie fluviale, que par camions. Mais ces types de transports sont torpillés par les capitalistes qui préfèrent les « travailleurs esclaves », les « forçats de la route », les routiers.
Le commerce des denrées alimentaires n’échappe pas à la règle. Il est le résultat d’une division du travail qui s’opère à l’échelle du monde. Produire du mouton en Nouvelle-Zélande, du bœuf en Argentine, des porcs en Bretagne, des tomates en Espagne, stimule l’hyper développement des transports, en particulier par camions, qui contribue grandement aux émissions de gaz à effet de serre : le transport représente 27,8 % des émissions nationales, le transport routier est responsable de 92 %… C’est pour cela que la localisation des productions est primordiale. Cela éviterait que différents ingrédients parcourent 3 500 km avant d’être réunis dans un pot de yaourt aux fraises ! Ou que des crevettes danoises, acheminées jusqu’au Maroc pour y être décortiquées, repartent ensuite au Danemark vers leurs lieux de commercialisation !

 L’aberrante inventivité destructrice des capitalistes n’a pas de limites. Il faut développer l’agriculture vivrière. Celle-ci doit permettre aux populations de se nourrir par elles-mêmes avec les productions locales, de saison. C’est la condition pour sauver le climat… et nous sauver avec !

Source : npa2009.org


 

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