Que veut Poutine ? se demande France Inter ce matin, avant de recevoir un éminent professeur de Sciences Po.
Variante
de la question : à quoi joue Poutine ? Ainsi formulées - et elles le
sont toujours ainsi - ces questions laissent penser qu'il y a, dans la
politique russe, un agenda caché. Et le président russe ne se contente
pas de poursuivre des buts secrets, il "joue" avec la naïveté et l'ignorance de ses partenaires. De la Syrie à l'Ukraine, en passant par l'hospitalité à Snowden ou l'homophobie (1),
de dossier en dossier, de continent en continent, Poutine n'en finit
pas de jouer. Sans doute même en éprouve-t-il une volupté, la malsaine
volupté du joueur, tout aussi secrète que ses objectifs. Et du joueur
professionnel au tricheur, chacun sait qu'il n'y a qu'un pas. Quelles
cartes cache-t-il donc dans sa manche ?
À remarquer que seul Poutine, et quelques autres figures de Méchants internationaux - la même radio se demandait hier "A quoi joue Erdogan ?" -
"jouent" ainsi avec l'opinion internationale. Les medias occidentaux ne
se demandent jamais : que veut Obama ? À quoi joue Obama ? À quoi joue
Merkel ? À quoi jouent Hollande et Valls ? Car il va de soi que tous les
objectifs poursuivis par la diplomatie ou l'Armée des démocraties
occidentales sont toujours limpides, transparents, exposés dans le
détail aux medias ou aux parlements nationaux.
Dernier exemple en date de la transparence occidentale,
le mini couac entre Valls et Le Drian, à propos des djihadistes
français, possiblement frappés par un bombardement de l'armée française,
couac rapporté entre les lignes par Le Monde (2). Après "qu'une source gouvernementale française, en marge de la visite de Manuel Valls en Jordanie" (lisez
: Valls, parlant en off aux journalistes) ait confirmé que des
djihadistes, dont éventuellement des Français, avaient été atteints par
un bombardement français en Syrie, dans la nuit du 8 au 9 octobre, Le
Drian a apparemment rétropédalé à toute vitesse. Le
Monde : « La France a frappé un camp dans lequel nous savions que se
trouvaient des combattants étrangers, dont probablement des Français et
des francophones, qui étaient là pour se former à des opérations
d’attentat en Europe et en France, indique-t-on à l’hôtel de Brienne. Nous
ne pouvons absolument pas préciser ni le bilan exact des frappes ni
évidemment la proportion de Français ou de francophones concernés. Ce
que nous savons, c’est que nous avons détruit le camp. »
Ce discret couac ministériel pose une question simple : les
djihadistes français ont-ils été spécifiquement visés par l'aviation
française ? Sont-ils précisément localisés par les services secrets
français ? Le bombardement de djihadistes français est-il un des
objectifs permanents des frappes françaises ? Et si oui, ces
bombardements ciblés posent-ils des questions juridiques particulières ?
Questions très simples. Si Hollande était Poutine, les medias français
seraient déjà en train de se demander "À quoi joue Hollande ?". Mais Hollande est Hollande, et la question ne se pose donc pas -d'ailleurs, personne ne la pose.
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