Jean-Luc Mélenchon
Encore ! Pour la quatrième fois depuis la crise sanitaire le
président de la République nous parle.
La dernière fois, c’était pour
nous vendre des voitures. Cette fois-ci peut-être allait-il annoncer une
tournée dans les bistrots et restaus réouverts à fond les ballons. Mais
rien. Juste un collage soporifique de grands mots empruntés à toutes
les familles politiques et débités comme on enfile des perles. Le
président a parlé de tout mais n’a rien dit. On verra en juillet, a-t-il
promis. Mais alors pourquoi avoir parlé cette fois-ci ? Un véritable feuilleton de bavardages
nous est infligé. Mais, admettons-le : en juillet les macronistes
auront besoin d’effacer très vite leur bilan des municipales. On doit
donc s’attendre à voir l’annonce du nouveau dispositif présidentiel. Une
fois déployé, il formera la base de la campagne macroniste pour 2022.
C’est utile de le comprendre.
Avant de spéculer sur cette hypothétique remise en ordre macroniste,
il faut pourtant étudier de près le flot de ses mots. Car il faut vaille
que vaille trouver les réponses apportées aux grandes questions
soulevées par le moment que nous vivons. Même s’il ne s’agit de rien de
précis, nous connaitrons au moins la pente prise par l’esprit du
président.
D’abord à propos de la stratégie de sortie du confinement économique.
Le propos présidentiel se résume à peu de choses : « il va falloir
travailler plus ». La stratégie macroniste se résume à cette seule
indication concrète. Tout le reste est fait de vœux pieux et de
généralités. Bien sûr, nous connaissons déjà ce qui a été décidé au fil
des jours, sans vision d’ensemble ni de cohérence. Ainsi a-t-il été
attribué 7 milliards à l’industrie automobile alors que 17 % seulement
des véhicules vendus en France sont produit sur place et 83% sont
importées. 15 milliards ont été attribués a l’industrie aéronautique.
Mais Air France passe une commande de 4 milliards à Bombardier qui
produit au Canada. On en passe et des meilleures. Toutes vont dans le
sens d’une absence de stratégie globale. Où sont là-dedans les objectifs
d’indépendance et de souveraineté ? Où est la relocalisation ? Et la
reconstruction écologique ? Il n’y a aucune contrepartie d’exigée par
l’État auprès des bénéficiaires de ces aides. Donc « travailler plus ».
Pour quoi faire ? Ce qui s’annonce, c’est une contraction générale de
l’activité. Comment l’empêcher ? Augmenter le temps de travail est
absurde. Si l’on veut jouer sur le temps de travail comme paramètre de
lutte contre le chômage, il faut alors baisser le temps de travail
individuel et augmenter la masse de travail totale. Il faut donc
travailler moins chacun pour travailler tous et produire davantage. La
seule idée concrète de Macron est donc une sottise. Quel que soit
l’objectif politique poursuivi, la réanimation du tissu économique passe
par l’existence d’une consommation populaire solvable. Les gens doivent
gagner mieux et être assuré de leurs lendemains. C’est la demande qui
fait tourner la machine, pas l’offre de produits sans acheteur !!!!!!!!
Ensuite, il y a le sujet de violences policières et du racisme dans la
police. L’intervention du chef de l’État venait au bout de la séquence
de la manif à République. Un paroxysme crucial. Tout l’énergie de
l’officialité médiatique a consisté a transformer la crise de la police
en dénonciation du communautarisme, voire du racisme anti-blanc. Du coup
le président a limité son propos dans des conditions plus que
discutables. Il a assigné à résidence « séparatiste » tous les
manifestants anti-racistes. Pas un mot pour la volonté de vivre ensemble
manifestée par l’énorme Marseillaise chantée sur la place de la République
ni pour les paroles sages et fortes d’Assa Traoré après le grotesque
pseudo incident « antisémite » gonflé par la préfecture de police. Une
honte qui montre le jeu dangereux auquel joue le président depuis qu’il a
trouvé ce mot de « séparatiste » pour faire diversion, déjà, en pleine
crise de la réforme des retraites. On le voit construire avec des mots
un apartheid de fait. Le séparatisme, ce serait les musulmans et les
populations des quartiers pauvres et pas celui des riches qui font
sécession par l’exil fiscal et la construction de quartiers forteresses.
Après cela, le plus stupéfiant reste quand même les silences sur tous
les sujets qui ont pourtant occupé des heures de débats dans la période
précédente. Où est passé l’abandon de la retraite par points, ou celle
de l’assurance-chômage ? Et la volonté affichée naguère d’arrêter les
accords de libre-échange et de relocaliser la production. Et la fin de
l’état d’urgence ? Pourquoi maintenir les interdictions de rassemblement
en dépit de la décision du conseil d’État ?
Qu’est devenu le fameux mea culpa
du 12 mars dernier : « Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est
des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du
marché. Déléguer à d’autres notre alimentation, notre protection, notre
capacité à soigner, notre cadre de vie au fond, est une folie. » Et
ainsi de suite, car la liste est bien longue.
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