Erdogan, "atypique" ou allié des Loups gris ?

Antoine Manessis

Les jdanoviens écrivent à propos de Recep Tayyip Erdogan : très loin de nous donc l’idée de lui apporter quelque soutien politique que ce soit. 

Mais si les Turcs, et spécialement les « petites gens » de l’Anatolie intérieure continuent à voter massivement pour lui, n’est-ce pas surtout parce que ce personnage atypique incarne à leurs yeux, à tort ou à raison, la fierté nationale turque et le refus de ramper devant la sacro-sainte « Europe » atlantique ?

Si de tels propos ne sont pas, pour le moins, ambigus et nationalistes, on se demande lesquels le seraient. Ce discours légitime Erdogan et la manière dont il veut être perçu. En fait, la Turquie sous son joug c'est le flanc sud de l'OTAN. En quoi ne rampe-t-il pas ? Sans doute parce qu'il se permet de donner le droit d'entrer à l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord. Oui à la Finlande, non à la Suède, selon leurs positions respectives à l'égard des Kurdes.

Donc il ne rampe pas quand il combat quiconque fait preuve ne serait-ce que d'humanité vis à vis des Kurdes, attaqués, massacrés, bombardés, assassinés jusque dans les rues de Paris. 

Ou quand il envoie des soldats turcs poursuivirent l'occupation de la partie nord de Chypre.

Ou quand il envoie des soldats combattre les mercenaires russes au Mali.

Ou quand il offre des drones à Zelenski.

Ou quand il menace la Grèce d'agression contre les lois internationales en Egée. 

Ou quand il encourage et arme l'Azerbaïdjan contre l'Arménie.

Ou quand il envoie sa soldatesque en Syrie combattre les Kurdes et soutenir des groupes terroristes.

Ou quand il fait du chantage "aux migrants" avec l'Europe.

Ou quand il est allié au MHP (Parti d'action nationaliste- Milliyetçi Hareket Partisi) et à sa milice paramilitaire les Loups gris (qui sont en étroite relation avec la CIA et la Mafia turque). Les Loups gris qui ont massacré des milliers de militants de gauche turcs et kurdes et ont commis des carnages de masses.

 Erdogan n'a rien "d'atypique", il est le fondé de pouvoir fascisant de la bourgeoisie turque, du capital turc, et il possède une base de masse dans les couches paysannes les plus arriérées du pays et des couches petite-bourgeoises les plus religieuses, les plus nationalistes, les plus anti-kurdes, les plus anti-grecs, les plus anti-alévis etc. Ses alliances avec les puissances impérialistes rivales ne répondent qu'aux intérêts du capital.

Sa défaite était souhaitable car faire exploser ce puissant verrou de la domination de la bourgeoisie turque qu'est Erdogan était le premier pas vers d'autres combats émancipateurs. Sa défaite aurait permis que les conditions de la lutte soient un peu plus supportables. Sa victoire est une grave défaite des forces démocratiques turques et kurdes. Ce n'est pas que le candidat qui était soutenu par toute l'opposition fut une merveille. C'est simplement que la défaite du nouveau sultan ouvrait de meilleures perspectives de lutte et c'est déjà énorme.

Quand on lit qu'Erdogan est " personnage atypique (qui) incarne à leurs yeux ( aux "petites gens"), à tort ou à raison, la fierté nationale turque et le refus de ramper devant la sacro-sainte « Europe » atlantique ? " (souligné par nous), on est en droit de relever que chaque mot est une stupidité et un mensonge qui entretiennent une confusion idéologique insupportable.

Mais rassurons les jdanoviens, avec 52% Erdogan pourra continuer son sale travail contre les Turcs, les Kurdes et toute la région.

Antoine Manessis