Antoine Manessis
Etrange sentiment que provoque l'éprouvante écoute d'Emmanuel Macron lundi sur TF1.
Parler pour ne rien dire. Parler sans que les mots n'aient véritablement de sens. Sans qu'ils n'aient prise sur notre attention, glissant comme les gouttes de pluie sur les plumes des canards.
Les journalistes qui devaient commenter la prise de parole jupitérienne le lendemain de son intervention ramaient comme les participants du Boat Race. Ils ne trouvaient rien à dire.
Baisse d'impôts et mesures...blablabla... le gouvernement devra lui faire des propositions...où ai-je rangé mes clefs voiture... le président ne donne ni le format, ni le calendrier de ces mesures.
Des mots accrochent un peu une fois la télé éteinte. Macron veut se concentrer sur les classes moyennes.
Qu'est-ce que c'est "les classes moyennes", ça commence où, et ça finit où ? Et pourquoi pas dire les classes populaires ? Ou encore les gens qui gagnent de X à Z par mois ? Il a bien tenté une explication : "C’est-à-dire les Français et les Françaises qui travaillent dur, qui veulent bien élever leurs enfants et qui aujourd’hui, parce que le coût de la vie a monté, parce que la dynamique des salaires n’est pas toujours là, ont du mal à boucler la fin du mois."
Donc, si on l'entend bien, au moins 50% des femmes et des hommes qui vivent en France.
2 milliards de baisse d'impôts c'est donc ridicule et surtout lesquels et pour qui ? Il veut économiser ces 2 milliards sur la TVA qui est l'impôt le plus injuste ? Ou sur l'impôt sur le revenu que les plus moyens parmi les moyens ne payent pas ? Et les riches qui ne payent presque pas d'impôts ? Et son copain Elon Musk, spécialiste de "l'optimisation fiscale" reçu par notre bon maître ? Et pourquoi pas des hausses de salaires ? Et pourquoi ne pas indexer les salaires sur le taux de l'inflation ?
Ou alors il voulait du flou parce que dire la réalité de sa politique est impossible, ça serait dire que le loup dévore l'agneau, que "la loi du plus fort est toujours la meilleure".
90% des salariés sont contre le passage aux 64 ans. Et alors ? Il fait ce qu'il doit et non ce qui le rend populaire. Surtout quand il sait qu'il ne peut plus se présenter aux suffrages des citoyen-ne-s et qu'il lui faut respecter sa feuille de route fixée en 2017 par le capital.
En fait, le pouvoir du peuple, par et pour le peuple, c'est-à-dire la démocratie, il en a rien à faire Macron. Ce qui compte c'est ce qu'il décide de faire, sans même tenir compte de l'Assemblée nationale dont la représentativité démocratique est pourtant très discutable. Ce qui compte, c'est que l'oligarchie capitaliste, dont il est le fondé de pouvoir, soit satisfaite, que les milliards s'entassent "dans les coffres-forts de la banque".
Le problème c'est que le roi est nu. Et que le spectacle est tel que sa parole est inopérante. Impotente. On ne foule pas aux pieds impunément la volonté du peuple. Le peuple porte un gilet pare-mots. Les mots ricochent mais ne pénètrent plus.
Et pourtant il a choisi, parait-il, la tactique de la "saturation médiatique", pensant sans doute qu'à force de parler il aura quelque chose à dire. C'est peine perdue : ce qu'il pourrait dire, qu'il ne sert que les riches, il ne le peut. Sous peine de réaction populaire imprévisible. Ce qu'il peut dire est vide, comme l'expression d'un épuisement de la politique néo-libérale qu'il applique.
4 ans ça va être très long.

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