vendredi 17 mai 2024

Biden s'emmêle les pinceaux

Antoine Manessis

Les États-Unis et le président Biden sont incapables de la moindre cohérence tant les intérêts du complexe militaro-industriel que l'exécutif étasunien met en oeuvre s'opposent aux intérêts du peuple étasunien. 

Or à l'approche des élections présidentielles qui ont lieu en novembre, Joe Biden tente de satisfaire le grand capital sans se mettre à dos une fraction de son électorat potentiel en particulier la jeunesse étudiante et des fractions des classes populaires.

Il annonçait donc il y a une semaine qu'il allait  limiter l’aide militaire à Israël pour faire pression contre l'offensive sur Rafah. "Je l’ai dit clairement à Bibi (Benyamin Netanyahou) et au cabinet de guerre : ils n’auront pas notre soutien s’ils vont dans les centres de population (…). S’ils entrent à Rafah, je ne leur livrerai pas les armes qui ont toujours été utilisées contre des villes". Cette annonce devait satisfaire, pensait-il, ceux qui attendent, en vain, du président démocrate qu'il tente un geste tant soit peu sérieux en faveur de la paix. Ou du moins du cessez-le-feu. Or c'est oublier que les États-Unis ont systématiquement mis leur veto à l'exigence de l'humanité quasi unanime de cessez-le-feu. Reste que l'annonce avait soulevé quelque espoir chez les démocrates de gauche.

Le soutien inconditionnel à Israël crispe en effet de plus en plus l’aile gauche du Congrès, ce qui se retrouve dans l'effritement du soutien populaire à Biden.

Or, se prenant lui-même à contre-pied, l'exécutif a notifié, le 14 mai, au Congrès qu’il allait procéder à une livraison d’armes à son allié pour un milliard de dollars. Des munitions pour tank et pour des véhicules militaires tactiques, c'est-à-dire des armes qui servent à massacrer des dizaines de miliers d'enfants, de femmes et d'hommes palestiniens. La parole présidentielle est démonétisée et on peut penser que cette nouvelle preuve de sa lâcheté politique ne va pas donner envie aux Etasuniens de gauche de faire montre d'enthousiasme pour le plus vieux président de son histoire. Des centaines de milliers d’électeurs avaient ainsi refusé de participer aux primaires dans le Michigan, le Minnesota ou encore la Caroline du Nord. Un premier coup de semonce qui allait être suivi par un tsunami sur les campus. Des milliers d’étudiants manifestent maintenant quotidiennement et campent même dans les universités pour dénoncer la politique du gouvernement alors que le risque de génocide a été pointé du doigt par la Cour internationale de justice (CIJ).

Il faut dire que des donateurs particulièrement fortunés de la campagne de Biden ont fait savoir qu'ils n'appréciait pas la "menace" de Biden à l'égard de Netanyahou. Cela aurait calmé les velléités pacifiques de Biden. Le Washington Post commente “cette décision souligne la réticence de l’administration à défier les donateurs pro-israéliens". On a bien compris.

Cela étant rappelons que si Biden voulait arrêter la guerre à Gaza, lobby ou pas, il le ferait. Si Israël a une marge d'autonomie, il doit être clair que c'est l'impérialisme étasunien qui en le maître en dernière instance. James Baker,  secrétaire d’État des États-Unis entre 1989 à 1993, fit mettre genoux à terre à Israël. C'est une question de volonté politique. Biden comme d'ailleurs son concurrent (en pire) s'alignent sur la politique de l'extrême-droite israélienne, parce que Israël est leur porte-avion dans une région stratégique.

Seul la mobilisation plus massive encore du peuple aux États-Unis peut freiner l'impérialisme, comme on l'avait vu avec la guerre du Vietnam,  et contribuer à son recul.

En attendant, ceux qui se font des illusions sur les locataires de la Maison-Blanche en sont pour leur frais. Le visage belliciste et criminel de l'impérialisme ne changera pas avec un changement de président. 

Au moins tant que les rapports de forces politiques aux États-Unis ne changent pas radicalement.

Antoine Manessis 

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