dimanche 26 mai 2024

Comparution immédiate dès 16 ans : Attal précise son offensive contre les quartiers populaires

Tristane Chalaise 

Vendredi 24 mai, le Premier ministre a réaffirmé la volonté du gouvernement d’instaurer la comparution immédiate pour les mineurs à partir de 16 ans. De la maison à l’école en passant par le tribunal, Gabriel Attal prépare un projet répressif sur toute la ligne contre la jeunesse et les quartiers populaires.

En visite à Valence vendredi 24 mai, le premier ministre a profité de l’occasion pour faire un « point d’étape », cinq semaines après le discours prononcé à Viry-Châtillon, lors duquel il avait présenté le projet du gouvernement pour remettre « l’autorité au cœur de la République ». Accompagné du ministre de la Justice et de la ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal a, entre autres, réaffirmé vouloir instaurer la comparution immédiate pour les mineurs à partir de 16 ans, promettant un projet de loi d’ici la fin de l’année.

Comparutions immédiates, placement en foyer « dès le premier fait » et sanctions pour les parents

Un peu plus d’un mois après avoir fait fuiter le projet de loi « relatif à la responsabilité parentale et à la réponse pénale en matière de délinquance des mineurs », le premier ministre est venu confirmer le projet du gouvernement de légiférer sur la comparution immédiate pour les mineurs. Gabriel Attal a réinsisté sur sa volonté de voir, d'ici à la fin de l'année vote d’un projet de loi, qui permette la mise en place, pour les mineurs à partir de 16 ans, d’« une procédure, un peu comme une comparution immédiate » .

Alors que plusieurs syndicats de magistrats, dont l’Union syndicale des magistrats, majoritaire, s’opposent aujourd’hui à la modification du Code de la justice pénale des mineurs, ce renforcement de la criminalisation et de la répression des mineurs s’inscrit dans la continuité des annonces du Premier ministre, qui, le mois dernier avait déjà annoncé vouloir aussi atténuer l’« excuse de minorité ». Elle impose, notamment, de ne pas prononcer pour les mineurs de peines de prison supérieure à la moitié des peines encourues par les majeurs.

Autre annonce faite à Valence, celle de « permettre pour certains jeunes le placement en foyer pendant une quinzaine de jours », dès le « premier fait », et en priorité pendant les vacances scolaires. Il s’agit à nouveau, pour Gabriel Attal, d’enfermer les jeunes considérés comme « délinquants », tout en pointant la responsabilité supposée des familles. Dans le même sens, le premier ministre a réaffirmé la volonté du gouvernement de sanctionner les parents « défaillants » à des peines de travaux d’intérêts généraux, qui pourraient désormais se cumuler à d’autres sanctions. Des parents que le premier ministre voudrait aussi voir davantage « encadrés », à travers des politiques de « soutien à la parentalité ».

À l’école, dans la rue et à la maison, « restaurer partout l’autorité » pour écraser la jeunesse des quartiers populaires

Avec ces annonces, Gabriel Attal vient remettre une couche dans un contexte d’offensive d’ampleur contre la jeunesse et les quartiers populaires. Alors que la mise au pas de la jeunesse était déjà en marche, avec, entre autres, la mise en place du SNU et le renforcement autoritaire à l’école sous le ministère Blanquer, les révoltes de l’été dernier ont donné un prétexte au gouvernement pour un déferlement de mesures toujours plus répressives contre la jeunesse et les quartiers populaires.

Le déplacement du Premier ministre à Valence s’explique ainsi par le lancement de la FAR (Force d’action républicaine), un dispositif lancé suite aux révoltes de l’été dernier, qui vise à « restaurer la sécurité » dans certains quartiers, en renforçant le déploiement et l’intégration entre police, justice et services publics et sociaux.

S’appuyant à la fois sur le ministère de la Justice et de l’Éducation nationale, mais envisageant aussi de faire recours à des militaires, Élisabeth Borne, puis Gabriel Attal, ont en effet multiplié depuis septembre les mesures et annonces visant les jeunes, mais aussi leurs parents.

Envoi des jeunes en " centre éducatif fermé ou en détention ", mise en place de « travaux d’intérêts éducatifs » pour les mineurs de plus de 13 ans et création d’internats à destination des jeunes « fauteurs de troubles » dès le collège, scolarisation des élèves au collège de 8 heures à 18 heures tous les jours en commençant par les établissements REP et REP+, signature d’un contrat d’engagement à respecter les valeurs de la République et l’autorité pour les parents, mis en place d’une mention « fauteur de trouble » sur Parcoursup pour les élèves « perturbateurs » avec une perte de points pour l’obtention du diplôme, amendes et TIG pour les parents d’enfants « délinquants »… La liste est longue.

Contre la surenchère répressive, dénoncer la criminalisation de la jeunesse et l’offensive autoritaire du gouvernement

Si le gouvernement promet aujourd’hui de la comparution immédiate aux mineurs, on peut rappeler que c’est environ 3000 mineurs qui sont déjà incarcérés en France chaque année. En réaction aux révoltes pour Nahel l’été dernier, le recours massif aux gardes-à-vue et à la comparution immédiate de jeunes majeurs avait abouti à un véritable " carnage " judiciaire, avec près de 2000 condamnations recensées à la fin de l’été https://www.revolutionpermanente.fr/Pres-de-2000-condamnations-suite-aux-revoltes-contre-la-repression-amnistie-pour-tous, dont un adolescent de 14 ans condamné à deux ans de prison ferme.

La surenchère répressive vise aujourd’hui à asseoir la position du gouvernement Attal en tant que figure de « l’autorité » et de la « République [qui] contre-attaque », dans un contexte où les crises et fragilités se sont accumulées sous l’ère Macron. Elles visent aussi à tuer dans l’œuf toute contestation, à travers un renforcement de l’arsenal répressif, qui cible en particulier la jeunesse, mais vise aussi les secteurs qui ont montré de la combativité face aux politiques anti-sociales menées par le gouvernement.

Une surenchère à laquelle seule la mobilisation de la jeunesse et du monde du travail pourra mettre fin. Alors que l’Éducation Nationale est aujourd’hui au cœur des attaques du gouvernement et que les enseignant·e·s se mobilisent contre le manque de moyens et le « choc des savoirs », que la police intervient pour réprimer la jeunesse et les militants qui se mobilisent contre le génocide en Palestine, et que les cas de répression syndicales se multiplient en France, il s’agit d’opposer une mobilisation d’ensemble contre le gouvernement et ses offensives. 

Face au renforcement de la répression et à l’autoritarisme de Macron, c’est la seule réponse possible.

Révolution Permanente

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