jeudi 9 mai 2024

Xi Jinping et Macron

Antoine Manessis

Xi Jinping vient en France à l'invitation d'Emmanuel Macron célébrer les soixante ans de relations diplomatiques franco-chinoises après la reconnaissance de la République populaire par de Gaulle.

Pour Macron deux axes principaux  dans cette rencontre.

Premier axe, demander à la Chine d'utiliser les leviers dont elle dispose sur Moscou pour contribuer à une résolution de la guerre en Ukraine. Xi a répondu "Nous comprenons le bouleversement qu’engendre la crise ukrainienne pour les Européens. La Chine n’est pas à l’origine de cette crise, et elle n’y est pas non plus partie ou participante. Nous espérons que la paix et la stabilité reviendront rapidement en Europe, et entendons œuvrer avec la France et toute la communauté internationale à trouver de bonnes pistes pour résoudre la crise."

La porte est donc ouverte d'autant que ce conflit coût cher à tous les belligérants mais aussi à leurs fournisseurs d'armes.

Emmanuel Macron a remercié Xi Jinping, de "demander à toutes les parties prenantes une trêve olympique durant nos Jeux à venir". Une occasion de travailler à "un règlement durable dans le plein respect du droit international". Le président français a salué "les engagements chinois de s’abstenir de vendre toute arme à Moscou". La Chine ne vend pas d'armes à la Russie mais contribue à la relative bonne santé de l'économie russe pour ne pas rompre l'équilibre que la Chine veut instaurer vis à vis de son rival Etasunien. Et quel dommage que Macron n'applique pas cette recette pour la France...

Le président chinois a affirmé que Pékin cherche une solution pacifique à la guerre. "Nous nous opposons à l’utilisation de la crise ukrainienne pour déclencher une nouvelle guerre froide", visant la politique des États-Unis.

Le deuxième axe est économique et commercial. C'est pourquoi Macron a fait participé aux entretiens la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen pour donner un caractère européen à la rencontre. Celle-ci avait en charge de défendre les intérêts des Européens. "Nous devons agir pour garantir que la concurrence soit équitable et non faussée. L’Europe ne peut pas accepter de telles pratiques qui faussent le marché et qui pourraient conduire à une désindustrialisation en Europe".

Macron a dit à peu prêt ma même chose souhaitant des "règles équitables pour tous" dans les échanges commerciaux entre l’Union européenne et la Chine. 

Un tel discours pour la galerie ne tient pas la route. L'Europe ne se gêne pas, dans ses relations avec bien des pays du Sud, pour oublier ce qui est équitable et non-faussé. On pense que le requin chinois a bien rigolé devant ce genre de propos venant du prédateur européen. Pour ce qui est de la désindustrialisation, von der Leyen nous la joue comique : tout de même, ce sont bien les capitalistes d'Europe qui ont fermé les usines pour aller en Chine où la main d'oeuvre était moins chère ! Que cela ait ensuite favorisé le capitalisme chinois est seulement l'illustration de ce que disait Lénine "Les capitalistes sont capables de fabriquer et de vendre la corde qui va les pendre" s'ils y trouvent un profit immédiat.

Le président chinois a clos le débat d'une phrase : "Le soi-disant problème de la surcapacité de la Chine n'existe pas." Et comme l'a dit l'ambassade de Chine avec humour "ce n'est pas la capacité de production de la Chine qui est en excès, ce sont les dépenses militaires américaines". Il est vrai que Pékin prévoit de consacrer 1 665,5 milliards de yuans, soit 214 milliards d'euros environ, aux dépenses militaires, ce qui reste plus de trois fois inférieur aux dépenses des Etats-Unis en la matière.

Pour Macron "La situation internationale, très clairement, nécessite plus que jamais ce dialogue euro-chinois". Dommage qu'il s'aligne en tout sur les États-Unis, ça n'aide pas...

Bien entendu Raphaël Glucksmann,  le grand penseur Otanisé,  que le PS a mis en tête de sa liste aux européennes, on se demande qui a eu cette idée géniale,  lui reproche à Macron de "dérouler le tapis rouge de façon obséquieuse à un dictateur". Entendre de une telle stupidité devrait ôter l'envie de voter pour un crétin pareil. Comme disait de Gaulle "Un Etat n'a pas d'amis, il n' a que des intérêts".

Quant à la tête de liste macroniste, Valérie Hayer,  elle tente de satisfaire ses électeurs de droite qui en sont encore au "péril jaune" mais de ne pas fâcher son chef Macron : "Quand on parle d’internement, quand on parle de stérilisations forcées, d’effacement de la langue et de la culture… oui, on peut penser qu’il s’agit d’un génocide (…), même si c’est à la justice internationale de trancher". Ouf ! Dur d'être funambule. Et quelqu'un veut lui parler de la Palestine ?

L'UE, plus lucide, mais non sans contradictions, considère la Chine comme une partenaire, mais aussi comme une concurrente et un rivale systémique. L'UE, menacée d’être prise en tenaille entre les économies américaine et chinoise, massivement aidées par leur puissance publique, engluée dans un libéralisme déconsidéré, incapable de cohérence, conséquence des contradictions inter-capitalistes entre les pays-membres, comme d'ailleurs dans leurs choix géopolitiques, est-elle "cliniquement morte" comme disait Macron (à propos de l'OTAN, ce qui n'est pas une preuve de perspicacité de sa part...) ?

En tous les cas s'il y en a un qui a bien saisi qu'il peut jouer sur les contradictions internes des Européens, c'est Xi Jinping qui rendra visite à la Serbie et à la Hongrie après avoir grimpé le col du Tourmalet...

Antoine Manessis

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