Le Conseil constitutionnel doit se prononcer sur la constitutionnalité de la suspension de la commercialisation des contenants alimentaires comportant du bisphénol A en France d'ici trois mois. 

Le gouvernement français vient de perdre une manche dans son combat contre le bisphénol A, un perturbateur endocrinien soupçonné de présenter des risques pour la santé et banni de l’ensemble des contenants alimentaires en France depuis janvier 2015.
Le 17 juin, le Conseil d'État a en effet demandé au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la constitutionnalité de la suspension de la commercialisation des contenants alimentaires comportant du bisphénol A, que la France a considérablement renforcé par rapport à la loi européenne.
En effet, l'Union européenne a banni le bisphénol A en janvier 2011, mais uniquement des biberons en plastique. Une mesure prise au regard des différentes études tendant à démontrer les effets indésirables de l’exposition au Bisphénol A sur le foie, les reins, la reproduction ou encore la glande mammaire.

Bras de fer 

Si certains pays tels que la France ou le Danemark avaient d’ores et déjà choisi de bannir le bisphénol des biberons en plastique, le gouvernement français avait décidé d’étendre la mesure à l’ensemble des contenants alimentaires, tels que les conserves, les bouteilles, etc, au grand dam de l’industrie du plastique.
Lire : Désaccords entre le gouvernement et l'industrie plastique sur le Bisphénol A
Le gouvernement français soutenait dans un rapport que des alternatives au bisphénol A pourraient être déployée rapidement pour l'usage alimentaire. À l’inverse, l’association des producteurs de matière plastique avait tiré la sonnette d’alarme, prévenant que les alternatives fiables et performantes au BPA n’existaient pas encore.
Le parti-pris français avait également fait grincer des dents l'Autorité européenne pour la sécurité des aliments (EFSA). Dans un rapport publié en janvier, l'EFSA avait pris le contrepied de la France en blanchissant au moins provisoirement le bisphénol.
Elle avait alors estimé qu'« aux niveaux actuels », le bisphénol A ne présentait « pas de risques pour la santé des consommateurs » même si de nombreux doutes restent à lever.
Lire : L'Agence de sécurité des aliments désavoue la France sur la dangerosité du bisphénol A
Le Conseil d’Etat, saisi par l'association Plastics Europe a indiqué dans sa décision que « la question de la conformité à la Constitution de l'article 1er de la loi française suspendant l’usage du BPA « est renvoyée au Conseil constitutionnel ».Ce dernier devrait se prononcer d'ici trois mois.

Mesure de suspension 

Plastics Europe a « salué la décision du Conseil d'État », dans un communiqué, en affirmant que la mesure de suspension du bisphénol A « prise au nom du principe de précaution (...) doit être aujourd'hui levée ».
« Il est temps de mettre fin à l'isolement de la France et de restaurer la confiance de tous dans les produits et dans le système de sécurité sanitaire européen, parmi les plus exigeants au monde », a déclaré Michel Loubry, directeur général de PlasticsEurope pour la Région Europe de l'Ouest, cité dans le communiqué.
« Aujourd'hui, les agences sanitaires, pas seulement en Europe, confirment que l'utilisation des produits à base BPA ne présente aucun risque pour les consommateurs », a-t-il ajouté.

​Bataille européenne

La bataille de Plastic Europe contre l’interdiction française n’est d’ailleurs pas nouvelle. L'association a en effet ouvert un front de lutte au niveau européen, s’appuyant notamment sur les entraves au marché unique que provoque la législation française sur le bisphénol A.
La Commission, saisie du sujet en 2013 par les industriels du plastique, a ouvert une phase pré-contentieuse en 2014. Elle doit maintenant statuer sur l’opportunité d'entrer dans la phase contentieuse pour entrave au marché intérieur.