L’alerte est venue de l’Est. Des réalisateurs tunisiens ont rejoint
l’appel au boycott de la 68 ème édition du festival international du film
Locarno, lancé par le PCABI (Palestinian Campaign for the Academic and
Cultural Boycott of Israël) en avril dernier intitulé : «Ne donnez pas
carte blanche à l’apartheid israélien» et signé par plus de 200
cinéastes, artistes et acteurs culturels, relayés par le mouvement
international BDS (Boycott, désinvestissement, sanctions) et, en Suisse,
par le Comité des artistes et acteurs culturels solidaires avec la
Palestine.
La sophistication du langage a permis, à la fois, une
désinformation rarement égalée dans notre propre pays et un maquillage
efficace des buts réels de ce type de manifestations dites
méditerranéennes. Il faudra revenir aux fondamentaux pour retrouver le
fil de cet imbroglio.
Ce Festival est dédié à un organisme de
financement de film sous tutelle du ministère israélien des Affaires
étrangères : Israël Film Fund, organisme soutenu par le Conseil
israélien pour le cinéma et mandaté par le gouvernement israélien comme
organisme consultatif de financement des films. Il bénéficie aussi du
soutien du département « Cinéma » du ministère des Affaires étrangères
dont le but est de « promouvoir les films israéliens à l’étranger avec
l’appui des attachés culturels des ambassades israéliennes partout dans
le monde ».
Comme le rappelle le cinéaste israélien Eyal Sivan
dans un entretien, Shimon Peres, en personne, le confirme au Festival de
Haïfa dans un discours aux cinéastes israéliens « L’Amérique a imposé sa
culture à travers le cinéma, nous allons imposer notre image à travers
le cinéma, c’est votre devoir ».
Les buts fondamentaux de cet
organisme sont loin de « l’innocence culturelle » que lui prêtent les
cinéastes algériens qui y participent avec leurs œuvres financées par
notre Etat.
Les cinéastes palestiniens avaient réagi bien avant leurs confrères tunisiens.
La désinformation nous l’avait caché et empêché notre opinion publique de réagir à temps.
Les Palestiniens ne demandant au Festival que le changement de la dédicace offerte à un Etat auteur de crimes de
guerre et de crimes contre l’humanité récurrents, boycotté
culturellement par les plus belles élites de la science et de l’art sur
les cinq continents qui le tiennent pour un Etat d’apartheid.
Il faut avoir l’esprit boy-scout pour aller chercher pareille
controverse ou poursuivre les buts de normalisation d’Israël, par la
culture, inaugurés par les politiques de voisinage du processus de
Barcelone puis l’Union pour la Méditerranée, mort-née de Sarkozy.
Les Palestiniens acceptaient de rencontrer des cinéastes israéliens
mêmes investis du devoir que leur commandait Shimon Peres mais ils
trouvaient inacceptable d’être les cautions d’une mission d’Etat de
Israël Film Fund. D’autant que la maison mère de cet organisme empêchait
les cinéastes de Ghaza de sortir de leur immense camp de concentration.
Ils ont demandé le boycott des organes étatiques israéliens et non pas des films ni des artistes.
En toute mauvaise foi, la direction du Festival a prétendu le contraire sans réussir à convaincre beaucoup de monde.
En solidarité, des réalisateurs et des producteurs suisses ont
également renoncé à concourir au Festival et des cinémas ont refusé de
faire la promotion de la manifestation et, par l’appel de deux cent professionnels du cinéma, « à annuler le partenariat entre le Festival de film Locarno et le gouvernement israélien ».
Dérangée dans son image et dans ses plans par ces critiques
palestiniennes, la direction du Festival changea le statut de cette
fondation de « carte blanche » en « open doors ».
Mais de l’aveu de ses responsables, la mission reste la même : « Comme
dans les exemples précédents, il a été décidé de privilégier une
industrie originale et complexe de films sur la scène contemporaine,
dans le but de donner une voix à des projets sélectionnés par le
Festival sur des critères purement artistiques ».
Pour certains Algériens, ce n’est pas l’art qui n’a pas de frontières, c’est l’argent qui n’a pas d’odeur.
Voulez-vous parier qu’un projet algérien au moins sera sélectionné et
promis à un financement israélien ? Et voulez-vous parier que l’Etat
algérien, avec toutes ses compétences, ne pouvait ignorer le secours
porté à Israël contre le boycott culturel mondial qui le frappe ?
impact24.info
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