François
Hollande est allé jouer à détrousse-cadavre en Grèce. Ces jeudi 22 et
vendredi 23 octobre, il était à Athènes. Le but essentiel de son voyage
était d’aider des multinationales françaises à profiter du plan de
privatisation imposé à la Grèce en juillet. Rendez-vous compte, l’Union
européenne exige de la Grèce des privatisations à hauteur de 50
milliards d’euros dans les années qui viennent !
Bien sûr, dans le
sillage de Mme Merkel, les entreprises allemandes ont déjà flairé les meilleurs filons.
François Hollande veut aussi une part du gâteau pour la finance
française. Qu’il ait offert à Alexis Tsipras une édition de L’histoire
de la Révolution Française de Jean Jaurès ne masquera pas le but de sa
visite. Cela révèle juste l’humour noir du personnage.
Sur la question centrale de la dette grecque, François Hollande a
totalement pris à son compte les positions officielles les plus dures de
l’Union européenne. Pour lui, il est urgent d’attendre avant de
discuter du sujet. « Il faut que la Grèce mette en œuvre les réformes
» du mémorandum de juillet avant de discuter de la dette. Quant à la
renégociation elle-même, il a confirmé qu’il était hors de question de
réduire le montant total de la dette. C’est pourtant le cœur de la
demande du gouvernement grec. Cette dette culmine en effet à près de
180% de la richesse produite par la Grèce en une année. Et cette
proportion devrait monter à 200% sous l’effet de la récession que vont
produire les nouvelles mesures d’austérité imposées.
François Hollande s’est donc une nouvelle fois aligné sur les durs de
la zone euro. Il a dit la même chose que le président du Mécanisme
européen de stabilité, l’allemand Klaus Regling dans le Financial Times
au début du mois. Seul un allongement éventuel des échéances de
remboursement est envisagé. Et dans le meilleur des cas, l’Union
européenne consentirait à évoquer une possible réduction du taux
d’intérêt exigé ! Mais rien de plus. Pour eux, le problème n’est pas la
dette, seul le montant à rembourser chaque année mérite d’être discuté,
sans s’avancer sur la décision finale. La mise sous tutelle de la Grèce
n’est donc pas près de s’arrêter.
La visite de François Hollande avait un peu l’allure d’une inspection
d’un consul aux colonies. D’un ton paternaliste, il a ainsi félicité
Alexis Tsipras d’avoir accepté le mémorandum d’austérité. Il a exigé que
la Grèce l’applique avec rigueur. La France va même apporter une « assistance technique » pour « accompagner la Grèce dans ses réformes
». C’est à dire pour la mise en œuvre du plan d’austérité ! Au secours,
notre pays va ainsi rejoindre l’Allemagne dans la liste des pays
fournisseurs de commissaires politiques chargés de veiller à la bonne
exécution de la saignée !
La liste des domaines « d’aide » fait froid dans le dos quand on sait
la politique du PS en France. François Hollande a ainsi promis de
l’aide dans la lutte contre la fraude fiscale. A-t-il prévu d’envoyer
Jérôme Cahuzac en Grèce ? Un autre domaine de coopération sera la
réforme des hôpitaux. Suppression de lits, fermetures de services,
renvoi à domicile expéditif des patients après les opérations, cette
recette détestable sera donc appliquée en Grèce aussi comme ici. Enfin,
le troisième domaine ne manque pas de sel. Il s’agit de la gestion des
actifs de l’État. C’est-à-dire que François Hollande a proposé l’aide de
la France pour aider la Grèce à privatiser ses aéroports,
infrastructures et entreprises et à brader son patrimoine immobilier et
terrien. En la matière, François Hollande sait de quoi il parle, lui qui
a déjà vendu des participations de l’Etat dans plusieurs entreprises
stratégiques en France : EADS, Safran, GDF…
Ces privatisations, c’était le véritable but de la visite de Hollande. « Je suis venu avec des chefs d’entreprises qui veulent investir en Grèce » a-t-il déclaré. Il a même poussé le vice à présenter cette démarche comme de la « solidarité » à l’égard des Grecs pour les aider à « augmenter la croissance
» ! On se pince ! Il a ainsi vanté la présence de 120 entreprises
françaises en Grèce, ce qui en fait le quatrième investisseur étranger
dans ce pays. L’objectif de François Hollande est d’augmenter leurs
parts de marchés, pas de relancer l’économie grecque.
Il a ainsi affirmé être « venu avec une délégation de chefs d’entreprises pour qu’ils aient confiance dans la Grèce
». Et il a listé les cibles : santé, énergie, services urbains,
nouvelles technologies… Les dirigeants d’Alstom, Vinci et Suez
environnement accompagnaient par exemple le chef de l’État. Avec chacun
un objectif précis. Pour Alstom, il s’agit de prendre le pas sur
l’allemand Siemens pour rafler la mise de la privatisation de
l’entreprise publique de transport ferroviaire. Suez environnement vise
la privatisation de la gestion de l’eau dans les grandes agglomérations.
Vinci espère profiter des ventes de ports, aéroports et autoroutes même
si l’allemand Fraport a raflé déjà 14 aéroports régionaux. Ceux qui
extorquent des sommes indues en France sur les factures d’eau ou aux péages d’autoroutes espèrent bien accumuler encore plus de profits sur le dos du peuple grec !
La méthode est sans foi ni loi. Suez par exemple est prête à tout
pour obtenir la gestion de l’eau de Thessalonique. Les citoyens ont
rejeté en 2014 par référendum à 90% la privatisation. Le Conseil d’État
grec a jugé cette privatisation anticonstitutionnelle car relevant d’un
service essentiel. Mais Suez espère obtenir une part du gâteau quand
même. Soit en obtenant du gouvernement grec qu’il relance la procédure,
soit en se limitant au rachat de 49,9% de l’entreprise.
Et François Hollande manœuvre tant qu’il peu au service de ses multinationales. Libération nous apprend ainsi que « et
d’une, Hollande aurait fait pression sur Bruxelles pour que les
financements de l’autoroute Corinthe-Patras soient assurés intégralement
par l’Europe. Et qui veut achever les travaux ? Vinci ! Et de deux, en
signant des accords d’assistance avec les administrations grecques, [la France] rentre
à l’intérieur des ministères… Soit le meilleur moyen d’accéder
directement aux dossiers économiques. Et de trois, le conseiller
économique de l’ambassade de France a le statut de “membre observateur”
de l’Eurogroupe au sein de Taiped, l’organisme qui gère les
privatisations et qui doit trouver cinquante milliards d’euros à
l’horizon 2018. De jolis petits cailloux avant de cimenter les contrats ».
Beurk ! Hollande jouait le « bon flic », laissant Merkel jouer la
méchante. Mais son attitude n’était pas seulement inutile, elle était
tout aussi nuisible pour la Grèce ! Cette visite intervient au moment où
commence la première « revue » de la mise en œuvre des réformes,
l’examen de contrôle par la dictature européenne. En fonction du bilan
que dresseront les émissaires des créanciers, la discussion sur la dette
commencerait ou pas. La venue de François Hollande est donc un message à
peine dissimulé : si Tsipras veut espérer un soutien sur la revue des
réformes, il va falloir faire plaisir aux businessmen amis de Hollande.
L’humiliation est totale. En guise de « solidarité », François
Hollande a aussi proposé que la France devienne le premier pays
d’accueil d’étudiants grecs. N’y voyez aucune philanthropie. C’est
seulement une réponse à Mme Merkel pour lui signifier son intention de
participer également au pillage des cerveaux grecs, domaine dans lequel l’Allemagne a pris une longueur d’avance.
Après avoir aidé à enfoncer le gouvernement d’Alexis Tsipras dans la
négociation du début de l’été, François Hollande participe activement au
pillage de ce qui reste de l’économie grecque. Et en notre nom,
paraît-il. La honte !
L’abaissement de notre pays par ses présidents actuel ou passés est
sans limite. Pendant que François Hollande jouait au pillard, Nicolas
Sarkozy participait à Madrid au Congrès du Parti populaire européen, le
parti de droite. À ses côtés, Mme Merkel et le Premier ministre espagnol
austéritaire Mariano Rajoy. Mais aussi le président hongrois Viktor
Orban, celui-là même qui construit des murs et des barbelés contre les
migrants ! Ainsi va la France vassalisée dans « l’Europe qui protège ».
Tiré de l'article " Hollande en Grèce ou à Paris : même duplicité "
Jean-Luc Mélenchon
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