Sans le soutien à Israël des Etats-Unis et de la communauté
internationale, l’occupation et le régime colonial imposés aux
Palestiniens ne pourraient se perpétuer.
Le mois dernier, Mahmoud Abbas,
président de l’Autorité Palestinienne, a déclaré devant l’assemblée
générale des Nations Unies, que les vingt ans d’efforts fournis dans le
cadre du processus d’Oslo pour établir un état palestinien s’étaient
soldés par un échec. Cette déclaration n’avait que trop tardé. Les
Accords d’Oslo qui furent signés par Israël et l’Organisation de
Libération de la Palestine par l’entremise des Etats-Unis ont été un
désastre pour les Palestiniens et une aubaine pour ceux qui désirent
maintenir l’occupation de près d’un demi-siècle par Israël de la
Cisjordanie, de Jérusalem-Est et de Gaza. Leurs fruits amers sont
observables dans l’actuelle flambée de violence qui frappe les
Palestiniens et les colons dans les territoires occupés.
Le processus d’Oslo n’avait pas pour objectif de mener à la création
d’un état palestinien ou à l’auto-détermination, en dépit de ce que les
dirigeants de l’OLP de l’époque semblent avoir cru. Il était, au
contraire, destiné par Israël à rationaliser son occupation en faisant
jouer le rôle de sous-traitant à l’Autorité Palestinienne. Dans les
Accords d’Oslo, et dans d’autres accords ultérieurs, les Israéliens ont
pris grand soin d’exclure toute disposition susceptible de favoriser
l’émergence d’une entité politique palestinienne disposant d’une réelle
souveraineté. Le statut d’état palestinien et l’auto-détermination ne
figurent nulle part dans le texte, qui n’accorde pas davantage aux
Palestiniens une totale compétence sur l’intégralité des territoires
occupés.
L’expansion des colonies juives illégales dans les territoires
occupés, qui a suivi le début du processus d’Oslo trahit même plus
clairement encore les intentions d’Israël. Il y avait moins de 200.000
colons en Cisjordanie et à Jérusalem-Est occupées lorsque les
négociations ont commencé. A l’heure actuelle, il y en a selon le Times
environ 650.000.
Quant à la direction de l’OLP, elle a piètrement joué de mauvaises
cartes. Elle n’a pas su tirer parti du savoir-faire que sa délégation
avait acquis au cours des deux années précédentes à Madrid et
Washington, envoyant à Oslo des négociateurs inexpérimentés, peu au fait
de la situation dans les Territoires occupés, et aux compétences très
limitées en droit international. Par conséquent, le processus d’Oslo
accentua plutôt qu’il ne réduisit le déséquilibre politique entre
Israël, puissance nucléaire non-déclarée soutenue par la seule
super-puissance au monde, et les Palestiniens, peuple sans état, vivant
sous occupation, ou en exil.
Grâce au poids des Etats-Unis faisant lourdement pencher la balance
en sa faveur – sur le plan diplomatique, militaire, et par l’exercice de
pressions sur les états arabes – Israël a été en mesure d’imposer sa
volonté, consolidant un système d’apartheid en vertu duquel des millions
de Palestiniens vivent sous un régime militaire, sans droits ni
sécurité, tandis qu’Israël s’approprie leurs terres, leur eau, et
d’autres de leurs ressources. La seule disposition d’Oslo qui fut en
fait fidèlement appliquée, c’est la protection que l’Autorité
Palestinienne apporte à Israël en assurant les fonctions de police au
sein de son propre peuple.
Dans son discours aux Nations Unies, Abbas, l’un des architectes des
Accords d’Oslo, a déclaré qu’il ne respecterait plus les termes des
accords sauf si Israël cesse de les fouler aux pieds. Cette déclaration
n’aura guère de portée, si elle n’a pas de traduction pratique, telle
que le démantèlement de l’Autorité Palestinienne, ou l’arrêt de la
coopération entre la police paramilitaire de l’Autorité Palestinienne et
l’armée israélienne. Rien n’indique que l’une ou l’autre de ces mesures
soit à l’ordre du jour.
Il est plus que temps de mettre fin à la farce d’un processus de paix
sans fin qui ne fait qu’accroître la souffrance des Palestiniens. Il
faut au contraire un nouveau paradigme qui repose sur le respect du
droit international, les droits de l’homme, et l’égalité pour les deux
peuples. Comme l’Administration Obama en a fait la preuve avec Cuba et
l’accord sur le nucléaire iranien, adopter une façon différente et plus
juste d’aborder des problèmes en apparence insolubles peut donner des
résultats. Il faudrait faire la même chose pour la politique
étatsunienne envers Israël et la Palestine, malgré les pressions que le
lobby israélien ne manquera pas d’exercer pour préserver le statu quo.
Les Américains sont plus en avance sur ce point que leurs hommes et
femmes politiques qui se laissent intimider. Un nombre croissant d’entre
eux – en particulier les jeunes, les personnes de couleur, les
progressistes – sont opposés au soutien inconditionnel des Etats-Unis à
Israël. Un sondage mené en décembre par Shibley Telhami, professeur à
l’université du Maryland, College Park, a révélé que 39% des Américains
étaient en faveur de sanctions, voire de « mesures plus sérieuses » à
l’encontre d’Israël pour son refus d’arrêter la construction de
colonies. Et d’après un sondage Gallup de février, même si 62% des
Américains soutiendraient Israël contre la Palestine si on leur
demandait de choisir un camp, ce pourcentage a baissé de dix points chez
les démocrates depuis 2014. Les hauts responsables du parti feraient
bien d’en tenir compte.
Les Etats-Unis et la communauté internationale arment, garantissent
financièrement, et soutiennent diplomatiquement le régime militaire
qu’Israël a imposé aux Palestiniens. Il faut mettre un terme à ce
soutien externe, sans lequel l’occupation et le régime colonial ne
pourraient se perpétuer, si l’on veut parvenir à une paix juste et
durable. Au lieu d’apporter à Israël une aide militaire croissante – ce
pays reçoit déjà la somme astronomique de 3 milliards de dollars par an,
et le président Obama en a promis encore davantage en compensation pour
la conclusion de l’accord sur le nucléaire iranien, auquel le premier
ministre israélien Benjamin Netanyahou s’est opposé à grands cris – les
Etats-Unis pourraient commencer par conditionner cette aide au respect
par Israël des lois nationales et du droit international. C’est ce que
demande Betty McCollum, députée démocrate du Minnesota au Congrès américain dans une lettre adressée au Département d’Etat.
Il est temps que les hommes et femmes politiques et les décideurs
américains cessent de se cacher derrière la fiction d’Oslo. S’ils
souhaitent réellement éviter que les mêmes choses se reproduisent, ils
doivent abandonner les stratégies qui ont échoué, laisser de côté les
platitudes vides de sens, et agir énergiquement pour mettre fin à un
système d’occupation militaire et à la colonisation qui sans leur
soutien s’effondreraient.
*Rashid Khalidi est détenteur de la chaire Edward Saïd et directeur du département du Moyen-Orient à l’université Columbia. Il est rédacteur en chef du Journal of Palestine Studies, et fut conseiller de la délégation palestinienne aux négociations israélo-palestiniennes à Madrid-Washington de 1991-93. Son dernier livre s’intitule « Brokers of Deceit. »
https://zcomm.org/znetarticle/beyon...
Traduction : Info-Palestine.eu - MJB
Info Palestine
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