samedi 25 mai 2024

CPI, Espagne, Norvège, Irlande...coups symboliques contre l'Etat colonial

Antoine Manessis

C'est un coup symbolique qui vient d'être porté contre Israël, qui a renforcé son isolement international.

Karim Khan, procureur général de la CPI (Cour pénale internationale) a demandé lundi 20 mai des mandats d'arrêt contre trois dirigeants du Hamas et deux ministres israéliens, dont Benjamin Netanyahu, pour des crimes de guerre et contre l’humanité présumés, commis dans la bande de Gaza et en Israël.

"Nous affirmons que les crimes contre l’humanité visés dans les requêtes s’inscrivaient dans le prolongement d’une attaque généralisée et systématique dirigée contre la population civile palestinienne dans la poursuite de la politique d’une organisation. D’après nos constatations, certains de ces crimes continuent d’être commis", a déclaré le procureur. Ce qui parait avoir le plus d'écho dans cette demande semble être la mise en cause de Benjamin Netanyahou, premier ministre d'Israël.

Celui-ci a réagi violemment contre cette demande de Karim Khan : "En tant que Premier ministre d'Israël, je rejette avec dégoût la comparaison faite par le procureur de La Haye entre l'Israël démocratique et les assassins de masse du Hamas. Il s'agit d'une distorsion complète de la réalité.Et, bien entendu, il a accusé la demande d'être l'expression d' "un nouvel antisémitisme"

Il s'agit, a éructé le boucher de Tel-Aviv, "d'un outrage moral d'une ampleur historique. Israël  mène une guerre juste contre le Hamas, une organisation terroriste génocidaire qui a perpétré la pire attaque contre le peuple juif depuis l'Holocauste," effaçant 80 ans d'occupation et de colonisation de la Palestine et la campagne génocidaire actuelle contre Gaza. Et, ajoute Netanyahou, Karim Khan, le procureur général de la Cour pénale internationale (CPI), est l'un des "grands antisémites des temps modernes". Après plus de 35.000 morts palestiniens à Gaza oser parler de génocide...Le fasciste Netanyahou ne craint pas l'obscénité et le ridicule. Quant à l'accusation d'antisémitisme à force d'être lancé contre tous les partisans de la paix et de la solidarité, juifs compris, elle est en train de perdre de son caractère d'intimidation. Le chantage à l'antisémitisme fonctionne de moins en moins. 

Comme l'a dit Rony Brauman "Il s'agit de se rassurer en projetant d'Israël l'image d'un pays démocratique, acculé à la légitime défense par d'incessantes agressions terroristes. On relègue l'occupation militaire de la Palestine, problème central du conflit, au rang de fait divers subalterne. La violence palestinienne, ainsi détachée de toute cause politique, ne semble inspirée que par une haine absolue, renvoyant d'ailleurs à une malveillance fondamentale du monde entier à l'égard des juifs." 

Dire qu'Israël est un fait colonial et que l'occupation et l'extension de la colonisation, condamnées par l'ONU à plusieurs reprises, est considéré comme "antisémite" par les sionistes. Il faut dire que l'amalgame fait, y compris les plus hautes autorités françaises, entre antisionisme et antisémitisme favorise ce discours négationniste.

Joe Biden lui a emboité le pas qualifiant cette décision de "scandaleuse" et a déclaré qu'il n'y avait "pas d'équivalence" entre Israël et le Hamas. Or Il ne s’agit pas "d’équivalence" entre un groupe terroriste et un gouvernement, mais d’équivalence dans les conséquences des actions commises des deux côtés au regard du droit humanitaire. En clair, un mort est un mort, d’où qu’il provienne. Joe Biden s'est vautré dans la lâcheté et le négationnisme confirmant ce que l'on sait déjà : "Nous nous tiendrons toujours aux côtés d'Israël face aux menaces qui pèsent sur sa sécurité". On se demande de quelles menaces parle Biden. La seule menace que l'on connaisse dans cette région du monde est la politique colonialiste et génocidaire d'Israël.

L'Allemagne a regretté une décision qui donne une "impression fausse d'équivalence." Encore un mensonge venant d'un pays qui ferait mieux d'être plus mesuré dans son expression compte tenu de son histoire face au processus génocidaire mis en oeuvre contre le peuple palestinien.

Le Hamas a réagi en condamnant "fermement" la demande de la CPI et a dénoncé "les tentatives du procureur de la Cour pénale internationale d'assimiler la victime au bourreau en émettant des mandats d'arrêt contre un certain nombre de dirigeants de la résistance palestinienne". On serait tenté de dire au Hamas que certains moyens pourrissent les fins...

Saluons le Quai d'Orsay qui a dit que "la France soutient la Cour pénale internationale, son indépendance, et la lutte contre l'impunité dans toutes les situations". Même si la Macronie n'a pas totalement suivi le positionnement du Quai puisque  Stéphane Séjourné, le ministre français des affaires étrangères, a souligné que "ces demandes simultanées de mandats d'arrêt ne doivent pas créer d'équivalence entre le Hamas et Israël.

En effet, il n'y a pas d'équivalence entre le Hamas et Israël car il n'y a pas d'équivalence entre la violence de l'opprimé et celle de l'oppresseur. Le Hamas a commis des crimes de guerre et contre l'humanité le 7 octobre, cela est difficilement contestable. Et cela est condamnable et largement condamné. Mais ne pas contextualiser ces crimes en les situant dans le cadre de la colonisation et l'occupation de la Palestine par le sionisme, c'est faire abstraction de la vérité des faits. Ne pas dire simultanément qu'Israël et son armée sont engagés dans un processus génocidaire à l'égard des Palestiniens c'est du négationnisme pur et simple.

Parallèlement à la position de Karim Kahn on a appris que l'Irlande, l'Espagne et la Norvège ont annoncé hier mercredi 22 mai qu'ils allaient officiellement reconnaître l'Etat de Palestine. Ils pourraient être rejoints par un quatrième Etat, la Slovénie. Aujourd’hui, 142 des 193 Etats membres que compte l’Organisation des Nations Unies (ONU) reconnaissent officiellement l’existence d’un Etat palestinien. Au sein de l’Union européenne 9 pays membres reconnaissent cet Etat. L’Irlande et l’Espagne deviennent ainsi les 10e et 11e Etats membres de l’UE à reconnaître officiellement la Palestine (la Norvège n’est pas un Etat membre de l’UE).

Le massacreur de masse fasciste Benyamin Nétanyahou dénonce "une récompense pour le terrorisme".

Biden a bafouillé des justifications ridicules pour camoufler sa complicité avec Israël et la France estime de son côté que "les conditions ne sont pas réunies à ce jour pour que cette décision ait un impact réel sur le processus de paix". On savait que le courage politique et Macron sont antinomiques, en voilà une autre confirmation. 

Rappelons le bilan, hélas provisoire, depuis le 7 octobre et l'agression israélienne contre Gaza : 1200 israéliens (en majorité des civils) tués le 7 octobre et 287 militaires israéliens tués depuis l'entrée des troupes israéliennes le 27 octobre dans le territoire palestinien. Au moins 35 709 Palestiniens tués (en majorité des civils). Vous avez dit équivalence ? Comme l'a dit encore Rony Brauman "la politique israélienne est de plus en plus détestée parce qu'elle est détestable."

Reste que ces derniers événements vont dans le bon sens, celui de la mise en quarantaine par la quasi totalité du monde de l'Etat sioniste colonial. Seuls les États-Unis, et quelques uns de ses satellites, s'obstinent à soutenir l'occupant et colonisateur israélien. Remarquons que l'Espagne, la Norvège, la Slovénie sont gouvernées par des coalitions où la gauche est présente. Quant à l'Irlande, son histoire et sa lutte historique contre le colonialisme britannique rendent toutes les forces politiques sensibles à la lutte anti-coloniale palestinienne.  

Ces signaux, qui font enrager Netanyahou et ses complices partout, ne peuvent que nous encourager à exprimer notre solidarité avec la lutte de libération du peuple palestinien.

Antoine Manessis 

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