jeudi 23 mai 2024

" Notre nuque ne pliera pas, nos genoux ne fléchiront pas" Selahattin Demirtas

Antoine Manessis

Selahattin Demirtas, co-président du HDP, désormais du DEM (Parti de l’égalité et de la démocratie des peuples ) a été condamné à quarante-deux ans de prison en Turquie. Emprisonné depuis 2016, Demirtas était poursuivi pour 47 chefs d'accusation.

Figen Yüksekdag, autre co-présidente du HDP (DEM), a pour sa part été condamnée à trente ans  d’emprisonnement. La défense a annoncé son intention de faire appel à ce verdict inique.

Avec eux, 106 autres personnes étaient poursuivies, accusées d’avoir déclaré leur soutien, en 2014, à la ville de Kobané qui subissait les assauts de l’organisation Etat islamique et qui était défendue par les combattants kurdes. Seules 12 parmi elles ont été acquittées. Parmi les condamnés des cadres et d'anciens responsables du parti de gauche HDP-DEM . Au Parlement, les députés du parti du DEM mais aussi ceux du parti social-démocrate CHP, premier parti d'opposition turc, ont tapé sur les bancs pour dénoncer ce simulacre de justice aux ordres d'Erdogan qu'ils considèrent comme une décision politique.

On ne constate aucun assouplissement du pouvoir  à l'égard de la question kurde et de la question démocratique.

En 2014, des manifestations avaient eu lieu à l'appel du HDP dans toute la Turquie pour soutenir la résistance de la ville de Kobané contre Daech. 37 personnes avaient été tuées dans la répression de ces manifs par l'Etat turc.

Lors de la première condamnation de Demirtas à 4 ans de prison la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH)  avait sommé Ankara de le libérer "dans les plus brefs délais" estimant que "son emprisonnement visait à étouffer le pluralisme politique". Evidemment en vain.

Le HDP hier, le DEM, aujourd'hui réclament l'autonomie des zones kurdes, et non leur sécession. Et la démocratie en Turquie. La gauche réclame la libération d'Abdullah Öcalan, le chef historique du PKK, et d'entamer des négociation de paix, la décolonisation du Kurdistan turc et en même temps des mesures de démocratisation pour toute la Turquie. 

Le pouvoir turc tente, à travers cette folle et cruelle répression, de briser la volonté démocratique du peuple kurde et du peuple turc. La liberté d'expression, la liberté de pensée et d’association sont insupportables à Erdogan dont le régime n'a cessé de se durcir et de mener une véritable guerre coloniale contre les Kurdes de Turquie et n'a pas hésité à s'attaquer hors de ses frontières aux Kurdes de Syrie et d'Irak.

Autre exemple de la frénésie répressive du régime d'Erdogan. Nous avions parlé ici même (http://nbh-pour-un-nouveau-bloc-historique.over-blog.com/2024/04/municipales-en-turquie-une-victoire-democratique-prometteuse.html) du député Can Atalay membre du Parti des travailleurs de Turquie (TIP), élu en mai 2023 alors qu’il était en prison, cet avocat de gauche radicale de 47 ans, connu pour ses luttes auprès des ouvriers, avait écopé de 18 ans de prison. Malgré la Cour constitutionnelle qui s'était prononcée deux fois pour sa libération, malgré le soutien d'Amnesty international et sous les huées des députés des oppositions, le Parlement turc (la majorité AKP) sur ordre d'Erdogan a déchu le député de gauche de son mandat de député qui reste en prison où il se trouve pour un "délit d'opinion", il avait soutenu le mouvement des jeunes de Gezi en 2013.

Et n'oublions pas la chanteuse kurde Nûdem Durak condamnée à 19 ans de prison en 2015 pour avoir défendu par sa musique la lutte et la culture des Kurdes, son peuple. (Lire le livre de Joseph Andras Nûdem Durak Sur la terre du Kurdistan). 

La dictature fascisante d'Erdogan n'a que trop duré. Le peuple kurde et le peuple turc doivent unir leurs combats pour en finir avec ce régime criminel et liberticide. Les occidentaux et la France en premier lieu doivent cesser leur complicité avec une Turquie qui occupe, contre le droit international et les résolutions de l'ONU, un Etat souverain, membre de l'UE, la République de Chypre. Qui réprime de manière sanglante la lutte du peuple kurde. Qui a fait de la Turquie une République de la peur. 

Laissons la conclusion à Selahattin Demirtas, condamné à 42 ans de prison pou son combat pacifique et démocratique : "La résistance, c’est la vie !"

Antoine Manessis 

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