jeudi 30 mai 2024

Plus de 130 plans de licenciement, 90 000 emplois menacés : « 2024 pourrait atteindre le record de 2008 »

Eugénie Tobhnom et Arsène Justo 

La CGT vient de publier un rapport alarmant sur les plans de licenciement qui se multiplient partout en France. Elle en a recensé 132, qui menaceraient entre 60 000 et 90 000 emplois.

La CGT a publié mercredi 22 mai une carte dans laquelle elle recense 132 plans de licenciements depuis septembre 2023, un chiffre certainement très sous-évalué, puisqu’il ne concerne que les entreprises où la centrale syndicale compte des militants. Au total, ces 132 plans de licenciement menacent à eux seuls plus de 33 000 emplois et, selon les estimations de la CGT, c’est entre 59 783 et 93 235 emplois qui seront impactés au total.

Derrière ces chiffres effrayants, par ailleurs peu repris dans les médias, c’est une nette tendance aux fermetures de sites qui se dessine, alors que comme le rappelle la centrale syndicale « le chiffre des défaillances cumulées 2023/2024 pourrait atteindre le niveau record de 2008… »

Parmi les boîtes concernées on trouve par exemple Casino et Monoprix, dont le rachat a permis à leurs nouveaux propriétaires, deux milliardaires, de faire payer aux salariés les dettes accumulées par la direction précédente, menaçant au passage 6 000 emplois. On y retrouve aussi Sanofi, où se sont succédés 4 plans de licenciements ces dernières années, et dont le dernier en date cible 330 salariés du secteur de recherche & développement contre le cancer, jugé pas assez lucratif par ses patrons…

On remarque surtout, grâce à la carte de la CGT, que près de la moitié des entreprises concernées font partie du secteur de la métallurgie. Ce secteur, dominé par l’industrie automobile, semble ainsi en première ligne face à la vague de licenciements dénoncée par le syndicat, qui pourrait menacer 500 000 postes dans toute l’Europe d’ici 2040. Par exemple, les travailleurs de MA France à Poissy, un sous-traitant du géant Stellantis, sont justement en grève en ce moment contre la délocalisation de leur usine, qui menace de mettre 400 travailleurs à la porte.

Le secteur automobile se porterait donc particulièrement mal ? Rien n’est moins sûr, puisque Carlos Tavares, PDG de Stellantis, touche de son côté la modique somme de 100 000 € par jour et que l’entreprise a versé cette année encore des dividendes colossales à ses actionnaires.

Ainsi, alors que les plans de licenciements sont généralement présentés comme ayant pour objet des « raisons économiques », impliquant des « licenciements économiques », la majorité des plans de licenciements actuels ont au contraire lieu dans des secteurs parfaitement rentables, mais qui, sur fond d’un ralentissement de la croissance mondiale et de concurrence internationale exacerbée, cherche à faire payer la crise aux travailleurs. Autrement dit, si les patrons de Stellantis délocalisent par exemple l’activité de MA France en Turquie, ça n’est pas parce que sa production en France n’est pas « en soit » rentable, mais qu’en produisant en Turquie, la direction de l’entreprise cherche à maintenir et à maximiser ses profits, faisant toujours primer le moins-disant social. Et pour cause, le régime politique et les acquis sociaux en Turquie permettent une exploitation plus implacable encore des travailleurs turcs que le régime politique et les acquis sociaux en France ne le permettent à l’encontre des travailleurs français.

Si pour les travailleurs, les licenciements commencent à se multiplier, les grands patrons, eux, ne sont pas vraiment à plaindre, puisque comme le rappelle la CGT : « avec 97 milliards d’euros distribués aux entreprises du CAC 40, la France détient le record européen des dividendes ». Sophie Binet, dirigeante du syndicat, note d’ailleurs que « les entreprises qui licencient et se gavent d’aides publiques sont aussi celles qui rémunèrent grassement leurs actionnaires ».

En définitive, que ces licenciements massifs soient liés à l’opportunité d’encore plus exploiter d’autres travailleurs, ou qu’ils soient liés à un manque de rentabilité ça n’est pas aux travailleurs d’en payer le coût.

Derrière les chiffres de dizaines de milliers d’emplois menacés se cachent des vies détruites par centaines de milliers. Les pertes d’emploi seraient par exemple la cause de 10% de l’ensemble des divorces, et les personnes au chômage sont près de 30% à envisager sérieusement à recourir au suicide, soit deux fois plus que le reste de la population. Cette mise au chômage forcée de dizaines de milliers de travailleurs, avec des grands capitalistes dont le seul objectif est de maximiser leurs profits, permet d’ailleurs de relativiser les mensonges habituels sur le prétendu chômage volontaire des « assistés »...

... qui sert pourtant très sérieusement d’argument au gouvernement pour ses attaques incessantes contre les droits des chômeurs.

Révolution Permanente

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