mercredi 3 juillet 2024

Désistements au profit de Borne et Darmanin : un dangereux cadeau à la macronie et à l’extrême-droite

Nathan Deas

En renouant avec le « front républicain » au service de la macronie, LFI rend service aux responsables des pires offensives des dernières années. De quoi renforcer le RN, qui s’est précipité pour dénoncer cette compromission avec Macron.

Dimanche, les élections législatives ont donné lieu à un score écrasant pour l’extrême-droite, ouvrant la voie à un deuxième tour inédit, marqué notamment par 306 triangulaires. Dans ce contexte, gauche et macronie ont appelé à des désistements en leur sein à l’occasion du second tour pour faire barrage à l’extrême-droite. Une politique de front républicain qui participe à réhabiliter le gouvernement, dans le cadre de laquelle une série de désistements ont commencé à être annoncés ce lundi, majoritairement du côté de candidats du Nouveau Front Populaire. Selon le décompte du Monde, figé ce lundi à 19 heure, 175 candidats arrivés troisièmes ont renoncé à déposer leur candidature au second tour.

Dans la 6ème circonscription du Calvados, le candidat du Nouveau Front Populaire, l’insoumis Noé Gauchard, a annoncé sur France Bleu Normandie ne pas se maintenir au profit d’Elisabeth Borne pour faire barrage contre l’extrême-droite. Tout en pointant la « responsabilité » du gouvernement « qui a mis dos à dos l’extrême droite et la gauche humaniste et progressiste », ce désistement laisse penser qu’il faudrait « faire barrage » au RN aux côtés de l’ancienne première ministre, artisane de la réforme des retraites, de nombreuses offensives contre les chômeurs ou encore de la répression des quartiers populaires après la mort de Nahel, et qui a mobilisé l’article 49-3 vingt-deux fois pour passer en force ses projets anti-ouvriers.

Même son de cloche, du côté de Leslie Morteux, militante de REV investie par LFI dans le Nord, qui a annoncé se désister au bénéfice de Gérald Darmanin. Dans un communiquéelle justifie sa décision : « Je veux vous appeler ici et sans ambiguïté à ne pas voter pour le Rassemblement National. Nous appelons la société toute entière à se réveiller face à l’imposture de ce parti raciste, antisocial et mensonger ». Le problème, c’est que le ministère de l’Intérieur lui-même a mené au pouvoir une politique raciste et anti-sociale, bien souvent inspirée du RN : loi séparatisme, dissolution d’organisations antiracistes, répression dans les quartiers populaires et les colonies, expulsions d’imams, etc... En décembre dernier, Marine le Pen saluait d’ailleurs une « victoire idéologique » après le vote de la loi Immigration portée par le ministre.

Ces désistements viennent s’ajouter à une longue série, comme celui de l’écologiste Celline Gacon au profit de Laurent Wauquiez. Cette longue série d’élus politiques ultra-réactionnaires soutenus indirectement dans le cadre du front républicain exprime l’impasse stratégique de la politique de « front républicain ». En effet, au nom de la lutte contre l’extrême-droite, cette politique de conciliation de classe participe à réhabiliter les artisans des pires politiques anti-ouvrières, autoritaires et racistes, érigés en opposants à l’extrême-droite.

Une politique sur laquelle surfe à fond le RN pour se présenter comme un parti anti-système. Ainsi, l’extrême-droite s’est empressée de sauter sur l’occasion des désistements en dénonçant sur les réseaux sociaux le fait que « Mélenchon retire son candidat face à E. Borne et soutien[ne] Madame 49.3 pour battre le RN ! », pointant un « renie[ment] » de « l’extrême gauche ». De son côté, Jordan Bardella a expliqué sur TF1 ce lundi soir : « on assiste à une alliance contre nature entre M. Macron et M. Mélenchon ». Une politique qui vise à disqualifier la gauche, décrite comme une alliée de Macron, qui montre une nouvelle fois le danger de la logique de conciliation du NFP.

En réhabilitant, quelques semaines après François Hollande, ceux qui, au pouvoir, ont mené de violentes attaques contre les travailleurs, pour « faire barrage » à l’extrême-droite, le NFP ne peut qu’amener à renforcer des partis responsables des pires attaques sécuritaires racistes et néolibérales et être le marchepied d’une alliance avec le macronisme… au profit de l’extrême-droite. Alors que le premier tour des législatives a révélé, une fois de plus, la profondeur du discrédit de la macronie dans le monde du travail, la logique de « front républicain » avec ceux qui se compromettent avec l’exploitation et l’oppression des travailleurs est une impasse dangereuse.

Contre cette logique, il y a urgence à défendre une politique indépendante du régime, qui permette de construire une riposte par en bas, sans compromission avec les partis au service des classes dominantes.

Révolution Permanente 

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