lundi 15 juillet 2024

Grèce : la barbarie capitaliste

Antoine Manessis

Semaine de 6 jours en Grèce. Sous le joug du système capitaliste la maltraitance sociale n'a pas de limite qu'imposé par le rapport de force avec le travail.

En Grèce, la cure austéritaire barbare imposée par le capital grec et la troïka, UE-BCE-FMI, c'est en gros une perte de niveau de vie de 50% pour les classes populaires et moyennes : le salaire minimum est à 830 euros brut, le salaire annuel moyen est toujours 25 % au-dessous du niveau d'avant-crise en 2009. Les retraites souffrent encore des onze plans de baisse successifs. Le coût de la vie est par ailleurs élevé : si les Grecs figurent parmi les plus pauvres de l'Union européenne, la Grèce est en revanche en 18e position en termes de niveau des prix parmi les Vingt-Sept. Le taux de chômage reste deux fois plus élevé en Grèce que la moyenne européenne. À quoi il faut ajouter la destruction quasi totale des services publics. Les gens sont KO debout. 500.000 jeunes Grecs (officiellement) ont émigré vers d'autres pays, cela plombe l'avenir du pays. 

Selon Eurostat (l'institut statistique européen) avec une inflation alimentaire à deux chiffres, des salaires très bas, des loyers qui flambent, l'essence à plus de deux euros le litre… au sein de l'Union européenne, les Grecs sont les plus démunis en termes de niveau de vie.

26,3 % de la population, soit 2,7 millions de personnes, est exposée au risque de pauvreté

Certes des luttes existent, nécessaires et ô combien méritoires, mais globalement le matraquage a été si violent que les réactions populaires sont faibles et la bourgeoisie et le capital international continuent de cogner.

Il faut dire, plutôt rappeler, qu'à cette situation sociale s'ajoute les effets de la défaite du gouvernement de Syriza (gauche radicale) qui a capitulé face au chantage de l'UE et cela malgré le soutien du peuple grec exprimé lors du référendum de 2015 par 61,31 % des Grecs. 

Tout cela a anéanti la crédibilité d'une alternative progressiste

Syriza a dégénéré en un parti de droite néolibéral, son chef Stéfanos Kasselakis est un homme d'affaire qui a passé une grande partie de sa vie aux États-Unis, où il a travaillé comme trader dans le secteur bancaire (c'est un ancien de Goldman-Sachs !). Il était soutien du parti républicain...Syriza a explosé en une myriade de groupes. Mais aucun n'a su regagner la confiance des Grecs. Syriza réalise un score de 14,9%, le PASOK (PS) 12,7%, MeRA25 de Yanis Varoufakis obtient 2,5% et NA (nouvelle gauche) 2,4% aux dernières européennes. Le KKE (PCG) obtient 9,2% ce qui un bon score et il signifie que le PC profite de l'effondrement de Syriza. Mais son sectarisme et son dogmatisme l'empêche d'être une alternative. Quant à la gauche de gauche, elle est laminée.

On peut dire que, s'il y a des Grecs de gauche, il n'y a plus d'alternative de gauche crédible en Grèce

La droite (ND) règne en maître (plus de 28%) avec l'extrême-droite. Pour situer les rapports de forces: le KKE obtient 9,2% est à égalité avec l'un des partis d'extrême-droite EL (solution grecque) qui est à 9,3%.

Voilà comment le gouvernement de Kyriakos Mitsotakis (droite ND) a imposé la semaine de 6 jours dans un pays où les salariés travaillent 41 heures par semaine, niveau le plus élevé d'Europe où la moyenne est de 36,1 heures. Désormais il pourront travailler 48 heures. "Le rêve des capitalistes d'Europe ce sont les salaires chinois" disait Marx. On y va. Y compris l'Etat-capitaliste chinois qui interdit les syndicats sur le port du Pirée (La NEP vous dis-je...). Alors qu'en Belgique la semaine de quatre jours fête bientôt ses deux ans, la Grèce a décidé d'opter pour les 48 heures par semaine.

Et ce n'est pas l'UE qui l'impose. Cette mesure était réclamée depuis longtemps par le SEV, le Medef grec. Mitsotakis a adopté même le "contrat zéro heure" à la mode britannique : un bonheur pour les patrons, qui disposent d’un vivier de travailleurs mobilisables à tout moment (jusqu’à 24 heures à l’avance) et payés uniquement pour les heures réalisées. De quoi engendrer des travailleurs pauvres, contraints d’enchaîner plusieurs jobs pour survivre. Il faut dire que le ministre du Travail est Adonis Georgiadis, un ex-membre du parti néofasciste Laos passé à la Nouvelle Démocratie (ND-droite).

La vie chère et les bas salaires poussent les salariés à l'acceptation d'un sixième jour de travail au détriment de leur santé et de leur vie

Un pas de plus vers un monde du travail moyenâgeux. Tout le monde s'inquiète de l'adoption de la journée de neuf heures qui, elle, ne sera pas rémunérée. Mais la contestation de la population contre la semaine de six jours ne décolle pas. Quelques mois auparavant, plusieurs manifestations ont été organisées, sans grande envergure. Assommés, groggy et surtout sans perspective, les Grecs rongent leur frein et leur désespoir.

Mais la droite par la voix du premier ministre Mitsotakis leur a généreusement accordé, cet été, le droit de travailler sept ans au-delà de l’âge légal de départ à la retraite. Pour gagner plus, ils pourront donc jouer les prolongations jusqu’à 74 ans.

Macron a donc un type plus fort que lui à Athènes

Quel magnifique exemple ! Mais pour l'heure il a en face de lui une gauche politique, animée par la France Insoumise, et des syndicats combattifs, un nouveau Front populaire qui revendique le gouvernement, le peuple l'ayant placé en tête des forces politiques.

Quant à ceux qui hésitent et ne savent pas trop s'il faut voter et pour qui, qu'ils regardent la Grèce, ça devrait les éclairer.

Antoine Manessis

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