Le climat des pré-négociations sur le dérèglement climatique
qui viennent de se terminer à Bonn était aussi chaud qu’obscurci par
d’épais nuages de langue de bois comme en témoigne le communiqué final
de l’ONU dont il faut rappeler qu’elle est responsable des conférences
sur le dérèglement climatique depuis 35 ans.
Un texte de 55 pages
souvent incompréhensible qui masque notamment que les discussions ont
chauffé entre les pays industrialisés et les nations émergentes qui ne
souhaitent pas « payer » les obstinations et les dégâts des nations
riches ; et que personne ne veut s’engager et résister aux lobbies
énergétiques et pétroliers. Un communiqué qui évite soigneusement de
préciser que le « préaccord » n’est est pas un puisque, pour sauver la
face, les négociateurs y ont laissé plusieurs centaines de parenthèses
contenant tous les désaccords, y compris ceux qui portent sur la
conjugaison des verbes. Car dans un texte diplomatique il existe une
différence considérable entre « devraient » ou « doivent », celle qui
sépare le bon vouloir d’un pays signataire de l’obligation sous peine de
sanctions. Sans oublier les astuces de traduction à partir de l’anglais
(langue de travail) permettant de masquer certains différents. Rappels
nécessaires pour apprécier le traditionnel enfumage des Nations Unies
qui n’aiment pas avouer les impasses et les échecs…
« Les gouvernements du monde se sont pleinement approprié le
projet de texte de l’accord, un texte équilibré qui constituera le point
de départ pour le dernier round de négociations. Les négociations
reprendront à Paris lorsque les gouvernements se retrouveront au Sommet
sur les changements climatiques de Paris, du 30 novembre à 11 décembre
2015. La Secrétaire exécutive de la CCNUCC Christiana Figueres a déclaré
que le projet de texte comprend des options supplémentaires qui
reflètent les préoccupations des pays en développement. « Nous avons
maintenant un texte qui appartient aux Parties, qui est équilibré et
complet. Le défi pour les gouvernements est de le ramener à une
structure beaucoup plus concise, claire et cohérente en vue de son
adoption à Paris ».
L’Ambassadrice française pour les changements climatiques
Laurence Tubiana a déclaré : « Nous avons un texte gérable pour la
poursuite des travaux à Paris. Bien que beaucoup de travail reste à
faire, le texte est une bonne base pour les négociations et les
négociations doivent commencer dès le premier jour de la conférence ».
Mesdames Figueres et Tubiana ont convenu que le processus politique
entre aujourd’hui et le début du Sommet de Paris sera au cœur du succès
de la réunion. Une réunion ministérielle de pré-COP aura lieu dans la
capitale française au début du mois de novembre pour travailler plus
avant sur les questions politiques de haut niveau concernant le projet
d’accord ».
L’autre problème c’est aussi que la plupart des ONG, surtout les
plus importantes et les plus installées, manient exactement la même
langue de bois que les plénipotentiaires, même si les arguments et les
appréciations diffèrent bien que dilués dans une imprégnation
« responsable ». Les Nations Unies ont bien peur de la réalité pour
avoir expulsé ces représentants de la société civile lors de la
conférence de Bonn. Ils sont en vérité bien inoffensifs, comme en
témoigne l’extrait du communiqué de l’organisation internationale Oxfam.
Elle et beaucoup d’autres paraissent avoir été contaminés ou
anesthésiés par des années de fréquentation des diplomates du climat.
Donc, l’opinion publique ne les entend pas plus ou pas mieux que les
délégués officiels. Et les manifestations auront bien du mal à masquer
les récupérations multiples de la société politique et industrielle
française qui fait feu de tout bois avec la COP 21 qui leur servent
surtout à faire oublier leurs responsabilités.
« Nous avons aujourd’hui les bases textuelles pour qu’un accord
ambitieux et équitable soit signé à Paris, mais nous manquons pour
l’instant clairement de volonté politique pour y arriver. « À 6 semaines
de la COP21, deux visions de l’accord de Paris se dessinent. D’un côté,
un accord qui fait le choix du plus petit dénominateur commun et ne
répond pas à l’étendue des besoins des populations les plus vulnérables.
De l’autre, un accord ambitieux et équitable, qui souligne l’importance
de l’adaptation pour les populations les plus vulnérables au changement
climatique. Il s’agira d’ici Paris de choisir les bonnes options. Les
pays en développement ont été clairs sur le fait que la présidence
française sera jugée sur la place donnée aux financements climat dans
l’accord de Paris. Cette question est pourtant encore aujourd’hui une
équation à multiples inconnues.
Les décideurs politiques doivent passer à la vitesse supérieure afin
de rehausser l’ambition en termes de réduction des émissions et de
s’assurer que les financements pour l’adaptation des populations les
vulnérables soient bien mis sur la table. Surtout l’accord ne peut
entériner le déficit actuel de financement de l’adaptation alors même
que tout indique que les engagements actuels nous maintiennent sur une
trajectoire de l’ordre de 3°C, qui serait dévastatrice en termes
d’impacts »
Les pays réunis à Bonn et qui doivent se retrouver à Paris, ne
réussiront effectivement pas à prendre des décisions entrainant un
ralentissement du réchauffement.
Les effets à la fois de la résignation
politique et l’offensive du monde des affaires et de l’industrie,
notamment pour nous vendre encore plus de nucléaire. Mais cela fait des
années que les ONG le répètent sans dépasser la faible audience de leurs
membres et sans changer leur vocabulaire. D’autant plus que plongés
comme lors des précédente conférences dans les discussions sur les
virgules et la conjugaison des verbes, les diplomates n’évoqueront pas
en séance les dérèglements climatiques en cours, avec leurs cortèges de
réfugies, de morts et de dégâts. Aussi bien en France, qu’aux Etats
Unis, en Afrique ou en Asie.
politis.fr
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