Une fois n’est pas coutume, lorsque les informations
touchent la Russie, la machine politico-médiatique tourne bien. Mais là,
nous sommes tombés très très bas, dans les bas-fonds peu fréquentables
de la propagande bon marché.
Cette fois-ci, France 2 et son journaliste
vedette David Pujadas ont franchi la ligne rouge en montrant des images
truquées de frappes russes en Syrie contre l’état islamique et en les
attribuant à la coalition, dans le 20 h présenté par Julian Bugier ce
jour là.
Ceux qui ont vus le JT de France 2
le 4 février 2016 ont dû être agréablement surpris : contrairement à
ces barbares russes qui frappent n’importe où et n’importe comment,
massacrant la population civile et les gentils terroristes opposants au
passage, les pays civilisés de la coalition américaine, eux, font des
frappes chirurgicales, certes moins nombreuses, mais dont la précision
remplace la quantité.
C’est à ce moment du discours que les membres du
Parti doivent tous comme un seul homme, se lever, la larme à l’oeil,
pour applaudr bien fort.
Voici en substance le message,
pas vraiment subtil, diffusé au JT de David Pujadas sur France 2 et
présenté ce jour-là par Julian Bugier. Et pour illustrer tout cela, des
images évidemment. Mais des images de frappes russes présentées comme
portées par la coalition. Or, pour des frappes russes, donc devant tuer
un bon millier de civils (chiffre sorti d’un joli chapeau), celles-ci
sont extrêmement précises, je dirais même « chirurgicales », bizarre.
Pas si barbares ces russes, finalement … Seulement, pour pouvoir les
attribuer à la coalition, les sous-titres en cyrillique ont été gommés,
et après nettoyage et maquillage, elles furent resservies à nos/vos yeux
ébahis d’admiration. Nous sommes forts, quand même ? Nous frappons
bien ! Le bon peuple doit être rassuré. Le bon peuple est rassuré. Les
affaires peuvent continuer.
Rien à voir avec les déclarations de Kerry
ou de Merkel, demandant instamment à la Russie de cesser les frappes
pour protéger la population civile et les gentils terroristes,
certainement ceux qui vendent le pétrole à la Turquie ou qui sont formés
par des instructeurs payés par le Congrès américain, qui n’a d’ailleurs
pas apprécié les résultats et remet en cause le programme de
financement de cette « opposition » qui recule devant la Russie et
Assad.
À propos des Etats Unis, il faut rendre à César ce
qui est à César : France 2 n’a pas innové. Et, oui, ici aussi, il a
fallu copier une technique déjà utilisée outre-Atlantique. Puisque en
novembre dernier, la chaîne PBS avait déjà utilisé des images de frappes russes pour les attribuer à l’aviation américaine.
À partir de deux fois, cela n’est plus une erreur,
c’est une politique. Toutefois, l’ambassadeur russe à Paris, A. Orlov,
déclare à l’agence d’information russe Ria Novosti,
qu’il y a peu de chances que la Russie ne donne de suite judiciaire à
cette manipulation, car il s’agit avant tout d’un problème éthique. Et
ce serait faire trop de publicité à une chaîne qui ne le mérite pas.
Certes, cette position est respectable et force le
respect. Mais encore faudrait-il que les responsables de cette « farce »
ait une conscience. Toutefois, la manipulation a été volontairement
faite, car il a bien fallu « nettoyer » les images. Soit le journaliste
vedette D. Pujadas n’était pas courant et l’on peut se demander en fait
quel est son rôle. Car il se rapprocherait alors plus d’un perroquet,
répétant, sans avoir la possibilité de s’interroger, un texte
pré-digéré. Soit il était au courant et c’est une faute professionnelle
grave. Dans les deux cas, il n’a plus sa place au JT. À moins, qu’il
n’ait exécuté des ordres.
Mais voyons, la France, patrie des droits de l’homme,
de la liberté, etc, etc, etc. Serait-il possible que la télévision
d’état ne soit devenue qu’un simple instrument de propagande ?
Comme disait Coluche :
« Les journalistes ne croient pas les mensonges des hommes politiques, mais ils les répètent. C’est pire. »
David Pujadas, reporter incontournable, présente le
JT de 20H sur France 2 depuis 2001, il est le journaliste des
Présidents, de formation à Sciences Po et qualifié de « bagarreur » par
certains de ses collègues. Remplacé parfois, pas de chances.
Personnellement, il y a quelque chose qui m’échappe. On a envie de
demander : tout ça pour ça ? Lorsqu’il est devenu journaliste, c’était
vraiment pour finir comme ça, comme simple caution propagandiste ?
Quitter l’Espagne de la dictature dans les années 60 pour la liberté et
finalement contribuer à instaurer une dictature de la pensée. Triste
destin.
Karine Bechet-Golovko | 11 février 2016
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