mercredi 17 juillet 2024

Austérité : la Cour des comptes met déjà la pression sur le prochain gouvernement

Axel Justo

La Cour des comptes a publié, ce matin, un nouveau rapport. Jugeant que l’état des finances n’est « ni satisfaisant ni acceptable », l’institution au service des marchés appelle le prochain cabinet à faire des « efforts difficiles » pour résorber la dette.

S’il est pour l’heure toujours impossible d’entrevoir quel gouvernement verra le jour à l’issue des élections du week-end dernier, les chantres de l’austérité ont de leur côté d’ores et déjà commencé à indiquer leurs exigences. Ainsi, la Cour des comptes a publié ce matin un rapport alarmiste, appelant à durcir la politique austéritaire, tandis que le président de la Cour, Pierre Moscovici, donnait dans la foulée deux interviews, l’une aux Echos, l’autre à France Inter, afin d’y défendre « l’impérieuse nécessité de réduire la dette ».

Des interventions médiatiques qui s’inscrivent dans la continuité de la procédure de déficit excessif enclenchée par la Commission européenne, quelques jours avant le second tour. Imposant à la France de présenter un plan budgétaire structurel, plusieurs médias, à l’image du Monde, craignent qu’elle ne provoque une nouvelle dégradation de la note de la dette souveraine française par les agences de notations, après celle décidée par S&P il y a moins de deux mois.

La rengaine est connue et on s’étonne presque que le FMI ne se soit pas joint (pour l’instant) à ce nouvel appel à la diète budgétaire, comme il l’avait fait il y a tout juste trois mois. Le gouvernement avait pourtant multiplié les gages, ces derniers mois, en annonçant des coupes budgétaire massives et plusieurs plans austéritaires. Bruno Le Maire, ministre en sursis, avait ainsi annoncé, jeudi dernier, [une nouvelle coupe budgétaire de 5 milliards d’euros-https://www.humanite.fr/social-et-economie/austerite/austerite-bruno-le-maire-annonce-5-milliards-de-nouvelles-coupes-budgetaires]. Une politique d’ores et déjà ultra-austéritaire qui ne satisfait cependant pas la Cour des comptes, qui se fait notamment le porte-voix des investisseurs et créanciers de l’Etat français, particulièrement inquiets de la crise politique ouverte par la dissolution et de la potentielle ingouvernabilité de la chambre basse.

Ainsi, l’institution regrette par exemple que « le projet de taxe sur les rentes, supposé rapporter 3 milliards d’euros dès 2024, [reste] dans l’attente d’une traduction législative ». Mais elle reproche aussi et surtout au gouvernement Attal de s’être montré « trop optimiste » et explique que l’État des finances françaises n’est, de l’avis de son président Pierre Moscovici, « ni satisfaisant ni acceptable ». La Cour considère notamment qu’il est de la responsabilité du gouvernement de trouver au plus vite 50 milliards d’économies supplémentaires. Elle se fait ainsi à la fois le porte-parole de la Commission européenne (qui impose que le déficit ne dépasse pas 3% du PIB) et des agences de notation.

Mais le rapport de la Cour s’adresse aussi et surtout au futur gouvernement qui prendra le relais de la mandature de Gabriel Attal. Le rapport interpèle en effet le « nouveau gouvernement », se gardant d’« anticiper » la « stratégie budgétaire » qu’il pourrait adopter, tout en fixant « l’objectif de maîtrise des dépenses, qui repose sur [les] 15 milliards d’euros d’économies additionnelles annoncées depuis février 2024 ». Le cap est donc donné : quel que soit le gouvernement, il lui faudra tenir une ligne très austéritaire, à même de satisfaire les marchés.

Un programme que Pierre Moscovici a explicité, plus longuement, dans Les Echos : « À chacun ses remèdes, mais il faut arriver à un consensus pour réduire la dette. Il faut que l’ensemble des forces politiques mesure la gravité de leur situation [celle des finances publiques, ndlr] et ce que cela impose à notre pays. Réduire notre dette est une ardente obligation. Ce n’est ni de gauche ni de droite : c’est d’intérêt général ! »

La publication d’un tel rapport, quelques jours après que les agences de notation ont de nouveau exprimé leurs craintes au sujet de la situation économique française et du risque d’ingouvernabilité qui pèse sur la nouvelle assemblée, témoigne des pressions colossales qui pèseront sur le prochain gouvernement, quel qu’il soit, déjà menacé par la procédure de déficit excessif enclenché par la Commission Européenne et par un taux d’emprunt très élevé. 

Dans ce contexte, le prochain vote du budget risque d’être particulièrement sensible et pourrait mettre à rude épreuve la nouvelle assemblée, dès à présent sommée de satisfaire les diktats des marchés et de conduire une politique austéritaire qui continuera de ruiner les travailleurs et les classes populaires, déjà laminés par l’inflation.

Révolution Permanente 

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