vendredi 9 août 2024

Les soignantes des urgences de l’hôpital Monod du Havre en grève contre le manque d’effectifs

Marion Dujardin

Premier employeur de la ville du Havre, l’hôpital Monod connaît depuis une semaine un mouvement de grève des urgences. En cause, la fermeture estivale des urgences de plusieurs hôpitaux et cliniques des alentours qui se répercutent et rendent impossible l’accueil digne des patients.

Symbole de la crise de l’hôpital public, le Groupe Hospitalier du Havre (GHH) rencontre fréquemment des mouvements de grève réclamant des moyens humains et matériels pour pouvoir simplement accueillir les patients dans des conditions dignes. Ce fut le cas récemment avec la mobilisation des brancardiers ou de l’unité 41. Depuis lundi 29 juillet, ce sont les soignantes des urgences de l’hôpital Jacques Monod qui ont débrayés face à l’impossible.

Si la situation des urgences se dégrade depuis de nombreuses années, ce sont les fermetures d’autres services d’urgences d’hôpitaux et cliniques de la région havraise (Fécamp, Lillebonne, clinique des Ormeaux et Ramsay) qui rendent aujourd’hui la situation invivable. Pour l’hôpital Monod, le dimensionnement humain et matériel est prévu pour seulement 35 000 passages par an. Pourtant l’année dernière, plus de 50 000 passages ont été enregistré sans que cela n’alerte la direction de l’hôpital. Après des courriers restés sans réponse, le directeur du GHH a finalement « pu consacrer » un peu de son temps pour se pencher sur la situation explosive du service il y a quelques mois, en accordant de manière ponctuelle pour l’été un seul agent de soin supplémentaire. Une mesure largement insuffisante pour des soignantes qui doivent assurer aujourd’hui la quasi-totalité des soins urgents de la métropole havraise.

Derrière des conditions de travail délabrées, c’est aussi et surtout des patients dont l’accueil s’allonge, et dont les conditions de soins se compliquent malgré les immenses efforts du personnel hospitalier. Ainsi, c’est jusqu’à 72 heures d’attente qui ont été constaté pour certains patients, avec l’ensemble des risques qui accompagnent ce délai, mais également un service surchargé, certains patients devant séjourner dans les couloirs, avec une logistique défaillante que les personnels soignants s’efforcent de compenser.

Face à cette situation insoutenable, que la direction de l’hôpital s’efforce de caractériser comme temporaire, les travailleurs soignants des urgences ont très largement décidé d’entrer en grève. La direction a répondu par des assignations non conforme à la loi face auxquelles les grévistes ont refusé de reprendre leur poste. « La direction, n’a pas fait parvenir en temps et en heure aux agents la fameuse assignation. Depuis, l’encadrement menace sous plusieurs formes les agents qui refusent de revenir, et cela sans remettre la dite assignation dans les conditions régies par la loi » résume une communication de la CGT GHH.

Vent de panique côté direction, qui a pour le coup monté une cellule de crise pour gérer les plannings. « Si seulement ils mettaient la même énergie pour s’occuper de notre situation quotidienne » nous confie une infirmière des urgences. Ignorant les immenses difficultés du service, la direction refuse à ce stade d’augmenter les effectifs, considérant qu’il ne s’agit que d’un pic, oubliant ainsi une situation quotidienne éprouvante pour les soignants et les patients.

« Tout est réunis pour que nous fassions mal notre travail et cette situation se répercute sur nos patients. On fait grève aujourd’hui car on est à bout et que l’on refuse d’être maltraitant avec nos patients. C’est un appel à l’aide ce mouvement de grève ! » affirme une autre infirmière du service mobilisé. Cette dernière dénonce aussi un problème plus globale : « Quand on a vu l’augmentation du budget des armées de Monsieur Macron, on s’est dit qu’ils avaient les moyens mais que leur choix ce n’était pas celui de la santé ! »

Au delà des choix financiers qui se répercutent sur les conditions de travail quotidiennes, ce que dénoncent les soignants des urgences, c’est l’abandon continu du service public de soins, au profit d’urgences privées financées avec de l’argent public, triant les patients et les actes médicaux pour conserver pour eux « les plus rentables », et envoyer vers les hôpitaux publics comme celui de Monod ceux qu’ils refusent de soigner.

Ainsi, cette grève est le symbole d’un secteur de la santé souffrant des coupes budgétaires et dont les restrictions se répercutent sur les conditions de travail et sur la santé et la vie des patients. Après plus d’une semaine de grève les travailleurs des urgences, qui sont majoritairement des femmes, continuent de témoigner de leur détermination et préviennent « Tant qu’on obtiendra pas davantage de moyens et des embauches pour accueillir dignement les patients on ne s’arrêtera pas ! On fait ça pour les patients et on est soutenu par les autres secteurs de l’hôpital ». 

En effet, cette mobilisation pourrait faire boule de neige tant les préoccupations porté par les grévistes font échos aux autres problématiques rencontrés par les autres secteurs de l’hôpital.

Aucun commentaire: